Études Sciences Humaines & Sociales

La voie du thé en Corée

Culture du thé en Corée du sud
Culture du thé en Corée du sud

Histoire, philosophie et  tradition du thé en Corée

Nous aborderons dans cet exposé la tradition du thé en Corée, qui a une dimension bien plus importante qu’une simple boisson : c’est un art, une philosophie de premier plan qui dépasse la sphère de la simple dégustation. Il m’a été surprenant de voir au cours de mes recherches à quel point cet “art du thé” englobait des domaines aussi diverses que la philosophie, la poésie, l’artisanat le plus fin, le bien-être et même le nationalisme, preuve que le thé est un symbole extrêmement fort dans ce pays.

C’est la raison aussi pour laquelle j’ai choisi ce thème qui permettra de mieux comprendre ce peuple sous cet angle culturel original. Je parlerai d’abord de l’élaboration de cette tradition du thé au cours des âges avant de voir concrètement comment cet art se manifeste dans la pratique de ce qu’on appelle la cérémonie du thé.

I. ELABORATION DE LA VOIE DU THE COREENNE

Les origines de la “Voie du Thé”

Naissance du thé, influence de la Chine

Il n’est pas possible de parler de la voie du thé coréenne sans la situer par rapport à l’histoire plus générale du thé en Asie du nord-est, qui trouve son origine en Chine. La culture du thé en Chine date d’il y a plus de 2500 ans. Les paysans dans les régions du sud-ouest de la Chine actuelle ont dans un premier temps utilisé les feuilles de plusieurs sortes d’arbres sauvages, dont l’arbre à thé (camellia sinensis), pour préparer des breuvages médicinaux, mélangeant des oignons, du gingembre, du sel, etc. Peu à peu, le thé a été reconnu pour ses qualités toniques particulières et sa culture sous forme de buissons de thé a commencé à se répandre dans toute la région méridionale de la Chine. Le thé est devenu un breuvage estimé dans les milieux savants et cultivés proches des cours et parmi les moines bouddhistes dès les premiers siècles. Lu Yu a écrit son Classique du Thé (Ch’a Ch’ing) en 780 perfectionne cet art de boire le thé dans un style simple, raffiné. A cette époque, le thé était séché en briques comprimées, qu’on concassait, puis on faisait bouillir les fragments avec un peu de sel.

Les coréens de la classe gouvernante participant aux ambassades qui se rendaient chaque année à la cour impériale chinoise ont rapporté du thé, influençant ainsi tout au long de son histoire leur propre tradition par le rite chinois, tout en l’adaptant. Bien plus encore, les moines bouddhiques faisaient de nombreux voyages en Chine, véhiculant le thé et la méditation “Seon” (Zen), union étroite qui perdure jusqu’à nos jours.

La légende de la reine Heo Hwangok

Un récit mentionne que, au premier siècle de notre ère, une princesse du royaume Ayudya de l’Inde aurait apporté du thé en Corée lorsqu’elle est arrivée par bateau dans le royaume Gaya au sud de la péninsule coréenne après un séjour en Chine. Elle est devenue la reine Heo Hwangok, épouse du roi fondateur de Gaya, Kim Suro. Certains textes avancent que lorsque leurs descendants faisaient les offrandes pour commémorer les morts, ils offraient du thé parmi d’autres boissons. La région en Chine du sud-ouest où la princesse est supposée avoir séjourné est précisément celle où la culture du thé a été pratiquée depuis les temps les plus anciens.

Une tradition ancestrale

La voie du thé en Corée est une très ancienne tradition. Selon le Samguksagi, chronique officielle composée en 1145 sur l’ordre d’un roi de l’époque Goryeo, le thé jouissait déjà d’une grande popularité aux jours de la reine Seondok (632-647). Plus tard, à l’époque du roi Heungdeok, un envoyé royal, retourna d’une mission en Chine de la dynastie T’ang apportant des graines de thé, qu’il planta dans un endroit ensoleillé sur les flancs sud de la montagne Jiri-san. Encore aujourd’hui on trouve des plantes de thé sauvages sur ces mêmes pentes. Le thé était alors bu conformément aux directives des connaisseurs chinois de la dynastie Song (960-1279), réputés pour la sophistication de leurs goûts : les briques de thé vert était réduite en poudre très fine puis mélangée dans un peu d’eau chaude. C’est sous cette forme que le thé se boit encore aujourd’hui dans la cérémonie du thé japonaise (chanoya). Au début de la dynastie Ming (1368-1644), la cour impériale a mis fin à la cul­ture du thé en briques, proclamant que désormais le thé se boirait sous forme d’infusion, l’eau chaude directement versée sur des feuilles séchées en vrac, tradition suivie aussi depuis par la Corée.

La Voie du Thé moderne et le vénérable Hyodang

Les “philosophes” du thé

Au début du 19ème siècle le savant Chong Yak-yong (1762-1836) s’est trouvé exilé de la cour pour des raisons politiques. Obligé de vivre pen­dant des années à Gangjin, dans l’extrême sud-ouest, il a rencontré le vé­nérable moine Hyejang (1772-1811), qui l’a introduit à la voie du thé. Chong Yak-yong, élevé “Dasan” (“montagne à thé,” nom de la colline où il vivait) a partagé pendant son exil cette voie avec les jeunes disciples qui apprenaient la philosophie avec lui. Son disciple Cho-ui a enseigné la voie du thé et de la méditation à de grands savants confucéens dans le milieu du 19ème siècle, échangeant poèmes célébrant le thé dont une très grande série de strophes sur la voie du thé, le “Dongchasong” (Chant du thé de l’est), faisant de lui le chef de file de tout le reveil du thé qui a eu lieu dans le 19ème siècle.

Propagation et temps d’arrêts

La voie du thé est entrée en Corée d’abord par les palais royaux, mais s’est vite propagée parmi la population et développée en Corée jusqu’à l’époque dite de Joseon, transmise par les moines bouddhistes dans les temples cachés parmi les collines, allant et venant entre la Corée et la Chine dans leurs pérégrinations. Elle est restée vivante à une échelle plus réduite jusqu’à ce que le Japon ait entrepris de l’abolir au cours de l’époque coloniale (1910-1945). Les japonais, annexant la Corée en 1910, ont aboli les traditions spécifiquement coréennes pour les remplacer par la tradition japonaise.

Le Vénérable Hyodang, nationaliste et théoricien de la Voie du Thé moderne

Né en 1904, dans le village de Yulpo (province de Gyeongsang du Sud), à l’extrémité sud-est de la péninsule coréenne, Choi Beom-sul a grandi dans une Corée qui vivait les dernières années de l’époque Joseon et, dès 1910, le début de la période coloniale sous l’occupation japonaise. Après l’annexion de 1910, très vite le Japon a tout mis en œuvre pour essayer d’effacer l’identité culturelle de la Corée. C’est de cette période que monte en lui le désire de raffermir cette identité à laquelle est mêlée selon lui la voie du thé coréenne.

En 1922, il est allé poursuivre des études au Japon et a très vite noué des relations avec des groupes de dissidents anarchistes coréens, grâce surtout à Pak Ryeol, un des plus importants des anarchistes. Il a participé à diverses actions de résistances et de dissidences, dont un attentat.  Reconnu partout comme un des grands héros de la résistance anti-japonaise, le vénérable Hyodang a eu à jouer un rôle important dans la fon­dation de la République de Corée après 1945 mais ses idées sur la société et la direction future de la Corée l’ont vite opposé au président Syngman Rhee, dictateur imposé par les Etats Unis.

La renaissance de la voie du thé s’est faite en Corée grâce qui a Hyo­dang qui a lui-même planté des arbres de thé and séché les feuilles selon d’anciennes traditions coréennes pour créer le thé ‘Panyaro’. Ensuite prati­quant à Seoul, il a encouragé le renouveau de la voie du thé pendant les der­niers mois de sa vie et publié en 1973 La Voie du Thé Coréenne, premier livre coréen moderne consacré à la Voie du Thé. En 1977 il a fondé L’Association coréenne pour la Voie du Thé’.

L’Institut Panyaro et le thé en Corée aujourd’hui

Chae Won-Hwa, la disciple.

Chae Won-Hwa, grand maître du thé, formée pendant une dizaine d’années par le Vénérable Hyodang, dirige actuellement l’Institut Panyaro pour la Voie du Thé à Séoul. Elle est considérée comme la personne la plus qualifiée et pour la théorie et pour la pratique de la Voie du Thé en Corée. Après la mort du Vénérable Hyodang en 1979, elle a fondé l’Institut Pan­yaro pour la Voie du Thé dans le quartier culturel d’Insa-dong, à Séoul en1983, selon les vœux du Maître. Depuis vingt ans elle enseigne la Voie du Thé.

Maître Chae Won-Hwa a hérité et transmet la méthode particulière de la production du thé vert appellé ‘Panyaro’ (Rosée de la Sagesse) et passe chaque année plusieurs semaines tout près de Dasol-sa à sécher ce thé pour obtenir son unique saveur profonde.

Son nom figure parmi la liste des 600 citoyens exemplaires de Séoul qui a été placée dans une capsule enterrée à Namsan (Séoul) en 1994 pour commémorer les 600 ans de la ville comme capitale du pays. Elle donne des cours à l’Institut Panyaro et à l’Institut pour l’Education Sociale à Yonsei et présente la cérémonie du thé Panyaro à l’étranger (notamment en France, en Chine, au Japon, et au Canada)

Une tradition toujours populaire

De nombreux coréens aujourd’hui ont appris à préparer le thé, suivant le rite de purification du corps et du cœur. Le thé coréen se distingue de celui de la Chine, cultivé en immenses quantités dans des plantations, ou du Japon, séché mécaniquement, par l’intensité de sa couleur, de son parfum, de son goût.

Les offrandes solennelles de nourriture et de boisson aux esprits des ancêtres pratiquées encore aujourd’hui dans la plupart des familles au Nouvel An et en automne s’appellent depuis toujours ‘Charye’ (rite du thé), même si le thé est souvent remplacé par le vin de riz.

La cérémonie du thé est restée encore aujourd’hui une valeur traditionnelle très pratiquée en Corée et un point de repère culturel important pour la jeune génération qui y trouve par la même occasion une ressource d’ordre spirituelle.

Le panyaro sous sa forme domestique (le prix de l’original est très élevé) est vendu dans tous les marchés dans le pays et la dégustation entre amis n’est pas toujours formelle mais reste un moment privilégié. La dimension cérémoniale est aujourd’hui toute fois davantage réservée à l’exercice religieux.

L’enseignement de l’Institut Panyaro pour la Voie du Thé

L’enseignement porte sur le Zen du Thé, en étudiant la Voie du Thé coréenne traditionnelle à travers les écrits classiques des grands maîtres du passé selon laquelle l’histoire de la culture humaine a commencé quand les hommes ont allumé un feu et fait bouillir de l’eau. La Voie du Thé représente la culmination de cette combinaison de l’eau et du feu.

Selon les pratiquants, du Zen du Thé est réalisée dans son essence lorsqu’une personne prend place, seule, dans un endroit retiré, allume un feu, écoute le bruit de l’eau qui chauffe, prépare et boit le thé, tout en prenant conscience paisiblement de l’environnement ainsi que des pensées qui surgissent des profondeurs et parvient ainsi à l’illumination, la révelant en accord avec son humanité. Cette philoso­phie aboutit à une prise de conscience, à dimension cosmique, de l’unité de tous les êtres, qui libère la volonté individuelle et permet de se mettre en marche vers un monde plus authentique.

II. LA PRATIQUE DU PANYARO

L’approche philosophique

Une Voie “sans portes” ouverte à “un cœur concentré”

“La Voie du Thé est sans portes” d’après le Vénérable Hyodang soulig­nant le contraste entre certains considérant la Voie du Thé comme quelque chose de complexe, d’aristocratique, inaccessible au commun et sa volonté que n’importe qui puisse pratiquer la Voie du Thé coréenne, quelque soit la classe sociale ou le niveau scolaire.

De même que la Voie est ouverte à chacun, il est tenu d’observer l’esprit de la Voie exprimé par la phrase “un coeur concentré.” Les gestes pour pré­parer et boire le thé sont extrêmement simples mais doivent s’accomplir dans un esprit qui convient à la Voie, dépendant de l’état d’esprit et du coeur de l’individu.

Le décor, les ustensiles, l’attitude et les gestes de ceux qui préparent et boivent le thé doivent observer les qualités suivantes : naturel, simplicité, modération, assurance, souplesse, reconnaissance. La Voie du Thé coréenne, enseignée par l’Institut Panyaro, n’est pas une “cérémonie du thé” formelle et ritualisée mais une “Vie du thé” où chacun pratique les valeurs les plus essen­tielles en accomplissant les gestes d’une des activités humaines la plus simple qui soit.

La purification du corps et de l’âme

“Nous savons bien que tout dans la vie s’en va comme la neige qui fond au printemps; et pourtant il y a un fond essentiel qui ne s’en va point. Per­mettre à chacun de découvrir ce fond en buvant le thé: voilà l’unique but de la discipline de la Voie du thé. Assis dans la solitude et le recueillement, là où l’on boit le thé, écoutant le bruissement léger de l’eau qui frémit sur les braises, préparant le thé, savourant son goût à la fois doux et amer, prenant conscience paisiblement des pen­sées qui s’éveillent, sortant de l’illusion par cette contemplation sereine, nous nous préparons à vivre d’une manière qui en soit digne: voilà la raison pour la pratique de la Voie du thé.

Purifier corps et âme par une pratique constante de la Voie du thé, atteindre à une unité en son propre être et avec la nature profonde de l’univers, et arriver ainsi à une véritable liberté: voilà le but fondamental de la pratique de la Voie du thé.

Collaborer à l’édification d’un monde plus habitable pour tous sur la base de cette nouvelle liberté: voilà un autre but pour tous ceux qui aiment le thé.

Notre famille de Panyaro, résolue simplement à traverser ce monde illusoire par la Voie du thé, invite chacun et tous à construire monde qui soit beau.

Venez, assez-vous avec nous, buvez.”

Le Zen du thé

La ‘Voie du thé’ part du geste simple et quotidien de boire le thé pour en faire une ‘voie’ spirituelle.

Le ‘Zen du thé’ indique qu’on touche à une méditation intuitive en buvant ainsi le thé.

Le Zen est une réalité qui ne peut s’expliquer par la parole ni par l’écriture. Le Zen est concentration et prise de conscience positive.

Le Zen est éminemment libre et original, subjectif en même temps.

Le Zen offre un raccourci pour arriver à une individualité sans limites.

Tout comme le thé.

Il suffit de préparer le thé et de savourer sur le bout de la langue ses six goûts: amer, âpre, acide, salé, poivré, sucré.

Le thé et le Zen doivent constamment gouverner et diriger le corps et le coeur; c’est seulement ainsi que vous arriverez à ce niveau.

Voilà pourquoi l’on dit, ‘le thé et le Zen ont une même saveur,’ et encore, ‘le thé et le Zen sont un.’

La Cérémonie du Thé Coréenne ‘Panyaro’

Le thé vert ‘Panyaro’

Le thé vert ‘Panyaro,’ séché selon la méthode unique élaborée par le Vénérable Hyodang, ne peut se procurer qu’à l’Institut Panyaro, de Chae Won-Hwa à qui la méthode a été transmise. Le nom a été créé en combinant trois caractères chinois: ‘Panya’ signifie le Prajna (la sagesse qui conduit à l’illumination selon le Bouddhisme) et ‘ro’ indique la rosée, donnant la pronon­ciation coréenne ‘Panyaro,’ signifiant ‘rosée de la sagesse’.

Le thé Panyaro est reconnu pour son goût d’une qualité exceptionnel du à un processus très réglementé mis au point par le Vénérable Hyodang. Sa culture a lieue dans les champs de thé qui se trouvent au-dessus du temple Dasol-sa sur les pentes du massif de Chiri-san, au sud de la Corée. Il est séché selon la méthode très exigeante appelée ‘jeungcha’ : vers mi-avril, pendant plus d’un mois les artisans procèdent au séchage de nouvelles pousses de thé fraîchement cueillies dans un grand chaudron en fer placé sur un feu de bois. Le thé Panyaro est ainsi fabriqué entièrement à la main, cette méthode très particulière donne au thé des qualités de couleur, de parfum et de goût tout à fait uniques.

Le thé Panyaro se prépare avec de l’eau très pure, eau qui, pour donner toute sa saveur au thé, ne doit pas dépasser soixante-dix degrés. Quand on boit une tasse de ce thé, on apprécie d’abord la couleur délicate et le parfum qu’il dégage; puis on le goûte sur la langue et dans la gorge; finalement on prend conscience de l’arrière-goût qui emplit la bouche. Le goût du thé Panyaro est censé être composé de six éléments dans une combinaison subtile: salé, sucré, amer, aigre, âcre et piquant.

La vaisselle traditionnelle

Les cérémonies du thé suivent le rythme des saisons et les récipients varient en fonction. Les poteries en pierre sont communes, celles en céramiques plus fréquentes, celles en porcelaines sont plus rares. La plupart sont faites dans des ateliers provinciaux spécialisés, un procédé précis étant également suivi.

Les différents types de vaisselles varient très souvent suivant les influ­ences religieuses, ainsi les Céladons ou Punchong (ou Buncheong), parfois réalisés en bronze avec des incrustations de platine, sont utilisés pour les rites du thé bouddhistes tandis que les porcelaines blanches sont plutôt déstinées aux rites confucéens. Les porcelaines plus brutes ou en pierre sont réservées aux animistes ou à l’export au Japon où ils sont appelés “gohan chawan” (litt. “tasse de thé pour le repas, pour le riz”). Pour ces dernières, on privilégie l’esthétique brute et rugueuse de la surface obtenue par la texture mélangée de sable et d’argile.

Les couleurs et les types des vaisselles changent suivant le rythmes des saisons en fonction des cérémonies célébrées pendant l’année.

Pendant l’été, on utilise les bols “katade” mesurant 5 cm de haut et en­viron 12 de large, ces dimensins sont requises pour favoriser un refroidisse­ment maximum de l’eau bouillante ce qui permet à l’eau de ne pas extrait trop d’arôme de la feuille de thé. Le thé est bu en laissant le couvercle du bol de­vant la bouche, attitude jugée plus convenable. Le thé peut être aussi bu froid.

A l’automne et en hiver, le nécessaire à thé est plus étroit en largeur, dans le style “irabo”, pour retenir la chaleur du liquide. Ils ont une forme caractéristique en spirale, peu profonde. Le thé est toujors pris chaud.

A l’inverse de la tradition chinoise, les vaisselles ne sont pas réalisées dans le but de faire résonner une quelconque note de musique, seule la beauté du ma­tériau est prise en compte. Les gestes de la cérémonie du thé coréenne

Dans toutes les cérémonies, on peut distinguer les mêmes gestes essentiels. Au début le service de thé est disposé sur un plateau légèrement élevé devant celui ou celle qui va préparer le thé, couvert d’un tissu. Tous les participants se saluent en s’inclinant, les mains jointes. Puis le tissu est enlevé, plié et posé à terre. Les tasses sont alors retournées. Du versoir, de l’eau chaude est versée dans la théière, puis de la théière dans les tasses pour les chauffer et de les nettoyer. Une nouvelle mesure d’eau est mise à refroidir dans le versoir. Le thé est mis dans la théière avec une cuillère en bois, puis on verse l’eau chaude dessus. L’eau qui chauffait les tasses est jetée; le thé est alors servi en passant plusieurs fois d’une tasse à l’autre pour que le goût du thé soit également réparti. Chaque tasse est placée sur une sous-tasse en bois (exception faite dans la cérémonie de l’offrande du thé au Buddha, la sous-tasse est alors en céramique). Les tasses sont alors portées aux invités; les mains jointes et chacun s’incline en signe de reconnaissance avant de boire.

Chaque participant doit prendre le temps de contempler la couleur du thé et de savourer son parfum avant de boire puis suivre la progression et l’évolution du goût sur la langue, dans la gorge, avant de savourer le goût qui reste dans la bouche. On verse une nouvelle mesure d’eau chaude dans la théière et, après une brève pause, toute l’infusion est versée dans le bol-versoir, qui sert à rem­plir les tasses. Ceci se répète une troisième fois. Ensuite les tasses reviennent à la personne qui préside la cérémonie pour être lavées. Le thé est vidé de la théière, qui est lavée aussi. Quand tout est terminé, le service à thé est recou­vert du tissu puis, de nouveau, chacun se salue, les mains jointes. Expérience d’un voyageur.

“Depuis mes toutes premières expériences avec le thé, l’aspect “sacré” de cette boisson m’a spécialement touché. Ce-dernier est resté au coeur de ma spiritualité au quotidien, quoique parfois bousculé par des aspects plus intellectuels, ne prenant cependant aucune forme de rituel. Le Chanoyu aurait pu m’intéresser mais je trouve sa forme vraiment trop rigide et sans spontanéité, en plus d’être ultra-nippone… surtout lorsqu’on sait ce qu’ils pensent des Gai­jin pratiquant la cérémonie! J’apporte donc, tout simplement, beaucoup de présence avant, pendant et après (pour la vaisselle entre autre!) la dégusta­tion. Percevoir les sensations: le silence derrière les sons, textures et chaleur, saveurs, arômes, beauté des objets, de la couleur de la liqueur, et cela sans m’accrocher aux pensées qui surviennent. Inspiré par l’enseignement du Zen et celui d’Eckhart Tolle que j’ai rencontré exactement à la même période de ma vie que celle où le thé a croisé mon chemin, cette manière de vivre en pleine conscience est l’épine dorsale de mon existence. Le thé est, pour moi, son vé­hicule idéal.

D’ailleurs, Stéphane de Tea Masters parle ici de l’attitude d’ouverture que le dégustateur devrait adopter pour percevoir les subtilités d’un thé. À quelque part, la présence c’est cette simplicité du regard de l’enfant qui voit avec ses yeux et son coeur, non avec son intellect.

Je découvre récemment la Voie coréenne du thé. Un Esprit bien plus simple et moins figé que celle pratiquée au Japon. Vraiment, je suis étonné à quel point il comporte des similitudes avec ma pratique personnelle.”

Extrait du blog le “Zhong nomade”

Références de l’exposé :

Encyclopaedia Universalis

Article anglophonne Wikipédia

Blog internet le “zhong nomade”

Vidéos Youtube.com

En guise de conclusion

J’ai abordé cet exposé en ayant en tête le parallèle français de vin-œnologie qui ne peut être appliqué aux relations que la Corée entretient avec le thé. La Voie du Thé a une très vaste dimension spirituelle et tient la position centrale d’un véritable art de vivre, comme si dans cette activité des plus simples se trouvait quelque chose de fondamentale dans la compréhension du monde. N’étant pas spécialiste des civilisations asiatiques, il est difficile d’en comprendre les tenants, mais difficile de pas être impressionné, partagé entre perplexité et respect devant un tel jusque-boutisme.

De même il est très intéressant de remarquer que la Voie du Thé est extrêmement vivace encore maintenant, reflétant encore l’image du contraste coréen tradition/modernité. Au même titre que le chamanisme trouve encore des applications dans la vie moderne et libère par sa pratique les travers des mauvais esprits, la tradition du thé coréen a rejoint la tradition de la musique contemporaine, pour donner naissance à un nouveau genre artistique, le “thé en performance”, signe que cette voie du thé reste très vivante.

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