Le manhwa
Introduction
La bande dessinée asiatique, longtemps méconnue en Occident, bénéficie depuis quelques années d’une popularité accrue et certaine. Outre le très célèbre manga japonais et le manhua chinois, on trouve également le manhwa coréen. Ce dernier, pourtant omniprésent en Corée, commence seulement à faire sa place sur le marché français.
Nous allons présenter plus particulièrement la bande dessinée coréenne susnommée, et pour ce faire nous avons notamment eu recours, par manque de sources écrites, à plusieurs ouvrages classés ‘rares et précieux’.
Ce dossier propose une présentation de l’histoire du manhwa au fil des siècles, puis distingue les différentes catégories de manhwa, en les illustrant de quelques exemples.
I / Histoire du manhwa
Origines du manhwa
Le manhwa s’inspire principalement des gravures anciennes servant à diffuser le bouddhisme et à le promouvoir auprès de la population coréenne, comme la fresque Bomyeongshudo qui présente une fable bouddhique selon une structure en cases, à l’instar des futures bandes dessinées. Sur d’anciennes sépultures coréennes, des fresques humoristiques ont également été découvertes : plus qu’une illustration religieuse, le dessin devient alors drôle.
Entre le 17e et le 18e siècle, la peinture populaire se développe. Les sujets abordés sont la nature et la vie du peuple, mais toujours de manière fantaisiste. Ce décalage entre le dessin et la réalité permet de supposer que le 17e siècle constitue l’origine du manhwa moderne.[1]
Enfin, le manhwa possède deux caractéristiques fondamentales héritées de la littérature coréenne : l’importance de la narration et la critique de la société. Ces éléments sont issus de la période Choseon, largement employés dans le kasa (poème narratif chanté), le japga (roman populaire), le pansori (récit chanté) et les spectacles de clown.[2]
1883-1910 : le manhwa moderne
Le manhwa moderne apparaît vers la fin du 19e siècle et le début du 20e siècle sous forme d’illustrations dans les journaux et les magazines. La structure est cependant peu habituelle : dessins et dialogues sont placés côte à côte, l’ensemble ayant à la fois de faux airs de tableau d’art et de bande dessinée.
« Illustration » de Lee Do-yeong, publié en 1909 dans le Journal Populaire de Corée, est considéré comme le premier vrai manhwa. Il s’agit d’un dessin humoristique et satirique critiquant les fonctionnaires pro-japonais et ayant, pour la première fois, le statut indépendant de bande dessinée.
1920-1945 : le manhwa dans la presse
Dès 1910, le régime colonial japonais réprime la liberté d’expression des Coréens, et les manhwas ne font pas exception. Ce n’est qu’en 1919 que les Coréens manifesteront leur désir d’indépendance vis-à-vis du joug nippon. Devant une telle ferveur, les Japonais cèdent et autorisent la publication de deux journaux privés : « Chosun Ilbo » et « Dong A Ilbo ». Le manhwa est alors utilisé à des fins éducatives et acquiert la popularité générale. En 1920, il se décline sous la forme d’une bande dessinée en quatre cases.
Avec la publication de « Les vains efforts d’un idiot » de Noh Su-hyeong en 1924, le manhwa adopte la convention occidentale des bulles de dialogue. Profitant de cet essor, An Sukju présente le premier manhwa pour enfants en 1925.
Hélas, les invasions nippones en Mandchourie et en Chine vont mettre un terme à cette lancée : les journaux coréens cessent d’être publiés. Le manhwa, alors quasi exclusivement publié dans ces derniers, est particulièrement ciblé car vecteur de culture et d’éducation.
Parallèlement, la bande dessinée japonaise est elle largement utilisée à des fins de propagande : l’objectif est d’inciter les Coréens à produire plus de riz, lequel servira de tribut pour le Japon.
1946-1960 : reprise du développement
La Corée délivrée de la guerre, le développement des manhwas reprend immédiatement. Les thèmes abordés concernent alors essentiellement la guerre de Corée (1950-1953), mais la critique trop intensive reste sévèrement punie. Kim Yong-hwan crée le professeur Kojubu, premier personnage populaire de la bande dessinée coréenne. Kim Sung-hwan vante pour sa part les prouesses des soldats du Sud grâce au soldat Totori, personnage également très populaire en ces temps troublés.[3]
Les manhwas pour adultes voient également le jour, et c’est à cette période que l’on trouve une pléthore de titres plagiant les mangas japonais. Plusieurs revues font leur apparition pour la première fois :
– « Le lapin et la tortue » de Kim Yonghwa en 1946, premier album coréen ;
– « Défilé de manhwas » en 1948, premier magazine consacré au manhwa ;
– « Actualité en manhwa » en 1949, premier magazine hebdomadaire (vendu à 45000 exemplaires environ) ;
– « Le monde du manhwa » de Kim Sungok en 1956, premier mensuel pour enfants.
Dans la seconde moitié des années 50, l’emploi des bulles de dialogue devient systématique, et la bande dessinée coréenne est alors employée à deux principales fins totalement distinctes :
– sous forme de tract, d’affiche, en tant que vecteur de propagande du gouvernement ;
– à bas prix et fantaisiste, afin d’apaiser les enfants traumatisés par la guerre de Corée.
C’est également dans les années 50 que débute la carrière de Kim Seong-hwan, manhwaga[4] extrêmement critique qui cible principalement l’hypocrisie des flatteurs vis-à-vis du pouvoir en place. Créateur de plus de dix mille parodies cinglantes, il dénonce notamment l’autocratie de Syngman Rhee, premier président sud-coréen, et plus tard le coup d’Etat de Park Chung-hee. Avec un tel acharnement, il sera méprisé par les politiciens, fortement censuré et même arrêté par les forces de l’ordre.[5] Notons tout de même l’incroyable longévité de son œuvre « Kobau », publiée pendant plus de cinquante ans.
1960-1970 : le manhwa pour enfants
Il se développe pour deux principales raisons :
– les manhwabangs[6] sont très bon marché, et deviennent de ce fait très rapidement de véritables paradis pour enfants, un havre d’imaginaire et de rêve ;
– l’Etat coréen mène une politique visant à tout contrôler, manhwas compris. Il pratique la censure à outrance afin de s’aligner sur le contrôle des mouvements communistes de l’époque.
De tels critères permettent une réelle explosion du manhwa, principalement parce que les histoires pour enfants qui y sont dessinées permettent une critique indirecte du gouvernement et de sa politique de contrôle et de censure.[7]
En 1968, l’ « Association des auteurs de manhwas pour enfants de Corée » est créée. Il s’agit de la première personne juridique pour la bande dessinée coréenne. Avec elle, tout un système éditorial est mis en place : des dizaines de magazines quotidiens, hebdomadaires et mensuels inondent le marché.
Les années 60 voient également naître le personnage Taengi, issu de l’imagination d’Im Chang. Héros de très nombreux manhwas pour enfants comme « Le chien préféré de Taengi », ledit personnage aux formes arrondies sera le modèle de nombreux auteurs.
1970-1979 : élargissement au public adulte
Dans les années 70, le manhwa est perçu comme un genre distrayant, accessible et drôle. Abordant le genre comique, voire caricatural, il acquiert le succès auprès des jeunes lecteurs.[8]
On le trouve partout dans les journaux, ainsi que dans de nombreux magazines spécialisés. Mais en 1972, un incident va provoquer une nouvelle censure : un enfant tue son ami, convaincu que la résurrection présentée dans les manhwas existe réellement.[9]
S’en suit alors une perte de créativité des manhwagas, bloqués par cette censure et contraints de s’en tenir à des thèmes classiques et sans approfondissement.
En 1979, la liberté d’expression finit par reprendre le dessus, et les manhwagas peuvent à nouveau s’exprimer librement dans leurs œuvres.
Après le manhwa fantastique et le manhwa de science-fiction, c’est le manhwa historique qui se développe, avec notamment « Les trois royaumes » de Go U-yeong. Adaptation d’une œuvre chinoise, « Les trois royaumes » illustre à la perfection la place prépondérante qu’occupe le manhwa historique dans cette décennie. Dans le même genre, le personnage Grospoing de Kim Won-bin connaît une popularité certaine. Adapté à la télévision pendant presque dix ans, « Grospoing » connaîtra même une réédition en 1992.
1980-1989 : le manhwa pour filles
Les années 80 constituent la décennie du sunjeong, le manhwa destiné au public féminin. Le sunjeong est au début de cette période très romancé, mais les thèmes qui suivront seront plus variés (fantasy et science-fiction, entre autres), sans perdre de vue la catégorie de lectorat auquel il est destiné.
Contrairement au phénomène de plagiat omniprésent après la Seconde Guerre Mondiale, de gros efforts sont ici faits pour se démarquer le plus possible du style shôjo, le manga destiné au public féminin japonais.[10]
Cette décennie permet aussi le renouveau du manhwa, grâce à « Dooly le petit dinosaure » de Kim Su-jeong. Premier manhwa à l’origine d’un dessin animé et de produits dérivés, il met en scène pour la première fois un héros antipathique et constitue une indiscutable réussite dans l’histoire de la bande dessinée coréenne.
Les années 80 sont également marquées par les longs récits narratifs, un genre particulièrement prisé à cette époque. Le thème récurrent est celui du sportif soumis à de nombreuses et difficiles épreuves qui va, grâce à un courage inébranlable et un entraînement intensif, connaître la victoire et la popularité.[11]
Le 10 juin 1987, des manifestations conduisent à une politique plus souple du gouvernement. Les manhwagas, jouissant alors d’une plus grande liberté, créent des héros plus réalistes afin d’aborder les problèmes de la société concernant la vie rurale, la pauvreté urbaine et la tragédie de la guerre (notamment celle du Vietnam, avec « Scramble » de Kim Hyeong-bae). Lee Doo-ho est un des grands représentants de ce courant réaliste, et il marque l’histoire du manhwa avec son personnage Lim Keok-jeong dans « Le bandit généreux ».
A partir de 1990 : épanouissement du manhwa
A compter de cette décennie, les thèmes abordés dans les manhwas se diversifient grandement (abordant des thèmes comme la violence ou le sexe de façon plus importante), conférant à ces derniers le statut de véritable phénomène de société. Le manhwa devient incontournable, et des concours et festivals sont même organisés dès 1991 afin d’encourager les jeunes auteurs.
Le gouvernement coréen, loin de la censure du passé, va jusqu’à lancer en 1996 un projet de formation et de développement du manhwa. Plusieurs universités créent elles une faculté de manhwa en leur sein, promouvant celui-ci au rang de genre artistique. Les magazines spécialisés ciblent de plus en plus leur public et permettent également d’organiser des rencontres avec les lecteurs.
Après la crise de 1997-1998, le marché du manhwa se consolide : 156 millions de wons en 2001, la moitié par les librairies et les grandes surfaces, et l’autre moitié par les manhwabangs.[12] Proches de la vie quotidienne et parfois autobiographiques, les manhwas sont alors bien souvent en couleurs.
Le manhwa se tourne enfin vers l’international et notamment vers Taiwan, la Chine, la Malaisie et l’Indonésie. Le Japon finit par reconnaître son importance et l’apprécie : des échanges de titres sont alors organisés entre la Corée et le Japon.
Le manhwa a cependant du mal à s’imposer sur le marché occidental, jusqu’en 2003 où la Corée est l’invitée d’honneur du Festival d’Angoulême. C’est l’occasion parfaite pour le manhwa de se faire connaître auprès du public français, et son succès est immédiat.[13]
D’autre part, le début du 21e siècle ouvre les portes d’un nouveau genre : le manhwa « underground ». Loin des codes habituels et des règles d’usage, ce dernier ne traite pas des problèmes collectifs de la société, et ne critique pas non plus le gouvernement. A la place, il revendique principalement le droit à l’individualisme, en rejetant la culture collective si chère à la Corée. Ce mouvement est représenté, parmi d’autres, par Kwoon Yoon-joo et son personnage « Snowcat », fervent défenseur du droit à la solitude.
Outre les librairies et les manhwabangs mentionnées précédemment, le siècle nouveau favorise la diffusion du manhwa grâce à internet et au téléphone mobile, et certaines œuvres leur sont exclusivement réservées.
II / Caractéristiques du manhwa
Description du manhwa
Le manhwa se lit de gauche à droite, comme les bandes dessinées franco-belges, les comics américains ou plus généralement la bande dessinée occidentale. Le manga, lui, se lit de droite à gauche.
Les formats sont variables, on peut aussi bien trouver des manhwas au format poche qu’au format semi-poche, et ils comportent entre cent et deux cents pages. La publication de manhwas dépasserait aujourd’hui neuf mille titres par an, et avec les progrès de la technologie, les supports sont actuellement très diversifiés. Ainsi, on peut trouver des manhwas sur internet et on peut également en télécharger avec un téléphone portable.
Les manhwas sont caractérisés par un dessin particulier où les visages et les yeux sont souvent agrandis. Le personnage en lui-même garde des proportions normales et l’utilisation des trames en dégradé est fréquente.[14] De plus, les onomatopées sont à l’origine en alphabet hangul.
Les manhwagas, voulant sortir de la production de masse inhérente au marché de la bande dessinée japonaise, tentent de se singulariser en réalisant des planches de manhwas qui sont souvent en couleurs et qui font l’objet d’un travail plus minutieux.[15]
Le manhwa couvre une grande variété de thèmes, il a ainsi été utilisé tant à des fins politiques[16] que pour raconter plus généralement le quotidien et les relations entre les gens[17] , mais aussi pour distraire les lecteurs avec des histoires qui leur permettent de s’évader.
Catégories de manhwas
Il existe différentes catégories de manhwas qui sont régulièrement comparées aux catégories de la bande dessinée japonaise, plus connues en Occident.
- Sunjeong : Le sunjeong est un manhwa destiné aux jeunes filles, il signifie littéralement ‘innocence’ et ‘pureté’. Il s’agit généralement d’histoires d’amour teintées de romantisme, compliquées ou non, dont les auteurs sont souvent des femmes. Le format d’origine du sunjeong semble être le format B5 (environ 176x250mm). En France, ce genre de manhwa est assimilé au shôjo japonais.
Dans « Kill me kiss me » de Lee Young-yoo, une jeune lycéenne, Im Tae-yeon, demande à son cousin qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau s’ils peuvent échanger leur place dans leurs lycées respectifs. Le but de cet échange est d’approcher un beau mannequin dont elle est amoureuse. C’est un manhwa assez représentatif du sunjeong, avec des histoires d’amour parfois complexes ou impliquant des triangles amoureux se déroulant dans l’univers scolaire.
- Sonyung : Ce genre de manhwa vise les jeunes garçons et les adolescents. Le sonyung est classé comme shônen (équivalent japonais) par la plupart des magasins français.
Le sonyung est en général imprimé sur du papier au format B6 (125x176mm).[18]
« Demon King » de Ra In-soo et Kim Jae-hwan raconte l’histoire d’un messager de la mort chargé de veiller sur le royaume des morts.
- Chungnyun : Le chungnyun est un genre de manhwa plutôt destiné aux adultes, principalement aux hommes. Ce genre est connu pour proposer des scènes plus violentes et plus crues que dans le sonyung. En France, l’âge conseillé pour la lecture de ces œuvres est de seize ans, et il est comparé avec le genre seinen qui est l’équivalent japonais du chungnyun.
Le manhwa « La Mosca » de Kang Hyung-kyu se déroule sur une île hostile abritant des monstres. Les protagonistes sont envoyés sur cette île officiellement afin d’y récolter du café et du cacao. En effet, la caféine est devenue une drogue et les hommes en sont maintenant dépendants. C’est un thriller relativement sanglant et mystérieux.
- Ttakji manhwa : Ce style de manhwa est né dans les années 1950 et rencontre son plus grand succès dans les années 1953 et 1954. Le ttakji manhwa est un manhwa d’aventure dont l’action de certains titres se déroule en Occident. Ce type de bandes dessinées est caractérisé par une qualité de fabrication médiocre, limitée à une vingtaine de pages dépourvues à l’origine de bulles et de cases. Il s’adresse en priorité aux enfants, et ses récits fantaisistes visent à les soulager des atrocités de la guerre de Corée. Parmi les auteurs emblématiques de ce genre, on peut citer Ge Won-i pour « L’île au trésor ».
- Long récit narratif : La caractéristique principale du long récit narratif est qu’on y retrouve souvent des histoires de sportifs, ou du moins de personnes confrontées à des épreuves et qui, pour parvenir à atteindre leur but, doivent montrer beaucoup de persévérance et consentir à d’énormes efforts physiques ou psychologiques.[19]
Dans cette catégorie, un manhwa est particulièrement célèbre : « Armageddon» de Lee Hyeon-se.
- Récit réaliste : Le récit réaliste aborde la vie quotidienne ou les préoccupations du moment. Lee Hee-jae a publié un manhwa très connu, « La maison de Haenim » qui narre la vie d’une famille coréenne.
- Bande dessinée en quatre cases : L’arrivée du manhwa sur téléphone portable a provoqué l’émergence de manhwas de quatre cases téléchargeables. Ces manhwas disposent d’une bande-son.[20]
- Autres catégories :Il existe également d’autres catégories très variées telles que le récit historique, le drame historique, le fantastique, la science-fiction, le manmun manhwa (ou manhwa en une seule case), la bande dessinée d’actualité, la bande dessinée humoristique, les récits didactiques, le sport…
Adaptations
Le manhwa voit régulièrement certains de ses titres adaptés sur un ou plusieurs autres supports. Le manhwa « Ragnarök » de Lee Myung-jin a subi plusieurs adaptations. Il a tout d’abord été adapté en jeu de rôles massivement multi-joueurs (MMORPG) sous le nom Ragnarök Online par le studio de développement et éditeur coréen Gravity Corp. . À partir de ce jeu, une adaptation sous forme de dessin animé a été réalisée par le studio nippo-coréen G&G Entertainment en 2004, alors même que les adaptations de manhwas en dessins animés sont moins courantes qu’au Japon.[21]
Certains manhwas ont aussi été adaptés en séries télévisées voire en films comme ce fut le cas pour le manhwa « Goong ».
Le manhwa « The Great Catsby » de Kang Do-ha a initialement été publié via le site internet coréen Daum. Il a été adapté en série télévisée en 2007 et, chose un peu plus rare, en comédie musicale la même année. Des rumeurs d’adaptation en film d’animation ont même filtré en 2010.[22]
Dans le cas de « The Host », le processus habituel est inversé. « The Host » est en effet au départ un film, et il a été par la suite adapté en manhwa.
Les manhwas donnent aussi lieu à la vente de produits dérivés souvent destinés aux plus jeunes. Ce commerce est florissant dans le monde entier et aurait rapporté plus de 100 milliards de dollars en 2007.[23]
III / Le manhwa dans le monde
Le manhwa en Corée
Le système de rémunération des manhwagas se fait en deux temps. Le manhwa est d’abord publié dans un magazine de prépublication et les auteurs touchent à cet égard une rémunération fixe qui est fonction de leur notoriété. Leur ouvrage est ensuite publié en format relié, ce qui leur permet de toucher des royalties, mais celles-ci représentent une source de revenu irrégulière.[24]
En Corée du Sud, s’il existe plusieurs centaines d’éditeurs, la plupart des manhwas sont publiés par trois grandes maisons d’édition : la Daiwon CI, la Séoul Cultural Agency et Haksan Publishing.[25]
Plusieurs festivals du manhwa se déroulent en Corée du Sud tels que le « Festival international de la BD de Séoul», le « Festival international de la BD et de l’animation de Dong-A/LG », le « Salon international de la BD de Bucheon ».
Le succès du manhwa est tel qu’une journée du manhwa aurait été créée en Corée en 2000.
En 2001, le Centre des Editions Culturelles de Corée estimait à plus de 42 millions le nombre d’albums en Corée. Cependant, le marché coréen du manhwa serait en difficulté depuis 2006. En effet, plus de 80% du marché de la bande dessinée en Corée du Sud est constitué de bandes dessinées étrangères et la part coréenne de ce marché est en baisse.
Le manhwa en Occident
En Europe, 190 manhwas ont été importés en 2005, sur un total de 1170 bandes dessinées asiatiques.[26] En 1999, l’exportation des manhwas a rapporté 240 000$ pour atteindre 3,26 millions de dollars en 2005[27]. Si l’exportation de manhwas existait déjà auparavant dans certains pays asiatiques comme le Japon, c’est l’exportation vers les Etats-Unis et l’Europe et l’Asie du Sud-est qui permet au manhwa de compenser les problèmes rencontrés sur le marché coréen.
Au niveau européen, le manhwa a reçu les honneurs de la Quinzaine de la bande dessinée à Bruxelles, avec une exposition intitulée « D’une ville à l’autre, Séoul ».[28]
Le manhwa en France
Certains éditeurs français ont tenté de publier des manhwas il y a une dizaine d’années, grâce à une mise en avant de la bande dessinée coréenne lors du « Festival international de la bande dessinée d’Angoulême ». Mais si le manhwa y a trouvé un public de connaisseurs, il n’a en revanche pas rencontré le succès espéré auprès du grand public. Par la suite, l’éditeur SEEBD (Société d’Edition et d’Exploitation de BD) aujourd’hui disparu a créé les labels Tokebi puis Saphira. Tokebi a lancé en 2003 un magazine en français sur le modèle des magazines de prépublication coréens et japonais. En 2007, le directeur éditorial de SEEBD Christophe Lemaire estimait que 10 à 15% des ventes de la bande dessinée asiatique en France étaient des manwhas.[29] Suite à la faillite de SEEBD, un membre de la société crée la maison d’édition Samji qui reprend la publication de certaines séries arrêtées. René Park, le créateur de Samji, fixe alors le prix du manhwa à 7,35€.
Le prix des manhwas en France peut varier énormément, notamment selon l’éditeur concerné. En effet, les éditions Paquet lançaient en mai 2005 une collection dédiée aux manhwas, regroupant plusieurs catégories de prix dont le plus bas était 3,95€.[30]
Plusieurs éditeurs qui sont habituellement présents sur le marché du manga publient aujourd’hui des manhwas. Les onomatopées à l’origine en hangul sont parfois traduites en français, mais on peut aussi trouver dans certains titres publiés en France un système de double affichage. Si le manhwa propose différentes catégories, force est de constater qu’actuellement les genres les plus publiés et plébiscités en France sont le sunjeong et le sonyung.
Après avoir été honoré à Angoulême, le manhwa est aussi présent lors du festival Japan Expo depuis la 6e édition du salon, en 2005. En effet, de nombreux auteurs de manhwa ont été invités lors de cette exposition pour donner des interviews et aussi rencontrer les lecteurs français à l’occasion de séances de dédicaces.
Si l’on peut être étonné que le manhwa soit présent lors d’un salon consacré au Japon et à sa culture, on ne peut que constater que le manhwa est encore très souvent proposé sous l’étiquette « manga ». Peu de magasins, grandes enseignes comprises, font la distinction dans leurs rayons entre les mangas et les manhwas. Sur les sites de certains éditeurs français, les manhwas sont répertoriés encore une fois comme étant des mangas. On remarque aussi que cela ne touche pas seulement le manhwa mais aussi le manhua, bande dessinée chinoise. Le nombre croissant de titres coréens est pour ainsi dire noyé au milieu d’une foule de titres japonais, ce qui est peut-être dommageable pour sa visibilité auprès d’un public parfois peu connaisseur qui ne sait par exemple pas toujours faire la distinction entre le nom d’un auteur coréen et celui d’un auteur japonais.
En février 2010, le Centre Culturel Coréen et la Korea Culture & Content Agency ont organisé une exposition de manhwa permettant une rencontre avec sept dessinateurs coréens renommés.
Conclusion
Le manhwa a beaucoup évolué en un siècle : non seulement l’histoire coréenne a influé sur les thèmes abordés dans la bande dessinée, mais les changements technologiques ont permis au manhwa de diversifier ses supports, passant des journaux à un format dédié, puis à la numérisation.
Avec la popularisation de la bande dessinée coréenne, les manhwagas ont réussi à créer un univers particulier leur permettant de s’affirmer face aux autres acteurs internationaux de ce domaine. Le manhwa étant de plus en plus exporté, il pourrait à terme fortement concurrencer les pays qui dominaient jusqu’à présent ce secteur, c’est-à-dire le Japon, les Etats-Unis et l’Europe.
Bibliographie
Ouvrages
Manga : origines, codes et influences de Daniel BLANCOU
Tan’gun N°2 : Comment peut-on être coréen ? de Patrick MAURUS
- Revues et magazines
Culture Coréenne N°71
Tokebi Magazine N°1-5
- Liens internet
http://www.animeland.com/articles/voir/92
http://www.animeland.com/articles/voir/93
http://www.toutenbd.com/article.php3?id_article=906
http://instinct-mangas.forumdefan.com/l-origine-des-mangas-f15/le-manhwa-t1265.htm
http://www.coreeenfrance.com/index.php?part=2&rub=11&art=6
http://fr.wikipedia.org/wiki/Manhwa
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ragnar%C3%B6k_the_Animation
http://en.wikipedia.org/wiki/The_Great_Catsby
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ditions_Tokebi
http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ditions_Saphira
http://livres.fluctuat.net/blog/1770-angouleme-manhwa-la-nouvelle-bd-venue-d-asie.html
http://www.evene.fr/livres/actualite/interview-oh-se-young-feux-manhwa-1142.php
http://www.katavila.com/articles/jade/manhwa-p1.pdf
http://world.kbs.co.kr/french/news/news_Cu_detail.htm?No=28432
http://www.manga-news.com/index.php/actus/2008/10/02/Rencontre-avec-Rene-Park-pour-Samji- Editions
http://comipress.com/article/2007/01/03/1272
http://www.culturecoreenne.fr/vmosaic.php?division=parNumero&url=071&type=mosaic
http://www.japanim.net/archives-634-Le_manhwa_debarque_en_France_et_en_force.html
[1] Source : Tokebi Magazine n°1
[2] Source : « Comment peut-on être coréen ? »
[3] Source : http://www.animeland.com/articles/voir/93
[4] Auteur de manhwa
[5] Source : http://www.toutenbd.com/article.php3?id_article=906
[6] Equivalent coréen du manga kissa, où l’on peut lire des mangas en payant à l’heure.
[7] Source : Tokebi Magazine n°2
[8] Source : http://instinct-mangas.forumdefan.com/l-origine-des-mangas-f15/le-manhwa-t1265.htm
[9] Source : Tokebi Magazine n°3
[10] Source : Tokebi Magazine n°4
[11] Source : http://www.coreeenfrance.com/index.php?part=2&rub=11&art=6
[12] Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Manhwa
[13] Source : Tokebi Magazine n°5
[14] Source : http://wapedia.mobi/en/Manhwa
[15] Source : http://livres.fluctuat.net/blog/1770-angouleme-manhwa-la-nouvelle-bd-venue-d-asie.html
[16] Source : http://www.animeland.com/articles/voir/93
[17] Source : http://www.evene.fr/livres/actualite/interview-oh-se-young-feux-manhwa-1142.php
[18] Source : http://www.katavila.com/articles/jade/manhwa-p1.pdf
[19] Source : http://www.coreeenfrance.com/index.php?part=2&rub=11&art=6
[20] Source : « Comment peut-on être coréen ?»
[21] Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Ragnar%C3%B6k_the_Animation
[22] Source : http://en.wikipedia.org/wiki/The_Great_Catsby
[23] Source : http://world.kbs.co.kr/french/news/news_Cu_detail.htm?No=28432
[24] Source : http://www.manga-news.com/index.php/actus/2008/10/02/Rencontre-avec-Rene-Park-pour-Samji- Editions
[25] Source : http://www.animeland.com/articles/voir/92
[26] Source : « Manga : origines, codes et influences »
[27] Source : http://comipress.com/article/2007/01/03/1272
[28] Source : http://www.culturecoreenne.fr/vmosaic.php?division=parNumero&url=071&type=mosaic
[29] Source : http://www.actuabd.com/Christophe-Lemaire-directeur-editorial-de-SEEBD-Aujourd-hui-le-gateau-meme-s-il-est-important-s-est-reduit-pour-tout-le-monde
[30] Source : http://www.japanim.net/archives-634-Le_manhwa_debarque_en_France_et_en_force.html