Avec l’empressement de la joie, la reine examine de près son nouveau bijou et s’aperçoit que c’est un vrai papillon. Attristée par sa découverte, elle s’endort. C’est alors que pendant la nuit, un papillon géant vient lui chuchoter à l’oreille. Elle se précipite le lendemain matin vers le roi lui rapporter les mots du papillon et le prie d’arrêter de chasser. Mais celui-ci refuse, et une aura lugubre envahit le palais puis se répand sur le royaume. Un jour, parti à l’aube dans la montagne, le roi trouve un magnifique papillon qui ne ressemble à aucun autre. Ce dernier se présente au souverain. C’est le même papillon que celui qui se manifesta dans le songe de la reine. Il s’appelle Nabi-sae. Nabi signifiant « papillon » en coréen.
Le roi, ému, reste une nuit entière à méditer dans les montagnes. Quand il revient au Palais, il ordonne la création de jardins magnifiques où pourront aller et venir les papillons. Et chaque année, dans la montagne où le papillon apparut devant le roi, le royaume célèbre Nabi.
Derrière le lyrisme des images à la couleur poudreuse et sous le couvert de personnages aux contours noircis à l’encre de Chine, se distille un récit captivant dont la morale, poétique et écologique, s’adresse autant aux adultes qu’aux enfants friands de contes.
Les descriptions sont légères mais savent apporter de précieuses informations à de jeunes lecteurs curieux. Par exemple, un paragraphe nous énumère des noms de lépidoptères spécifiques qui sont une première approche charmante de l’entomologie pour les enfants. De même, s’ils sont curieux de l’ambiance coréenne à l’époque Joseon, ce livre développe de cours aspects de la Cour et de la société coréennes.
Dès la première page, une phrase évoque les fameuses femmes plongeuses de l’île de Jeju, les Haenyo, qui perpétuent la tradition de la pêche aux coquillages afin de pallier les faibles rendements de l’agriculture. Tandis que le texte évoque subtilement la séparation des époux sous la dynastie Joseon, le couple royal, emblème du pouvoir et de la droiture, confère toute sa puissance morale à l’histoire. La fable aborde également le rapport de l’homme à la nature. Comme souvent dans les contes coréens, les rois font les bons choix pour vivre en harmonie avec la nature et obtenir ses grâces.
La sagesse ancestrale trouve avec ce conte un joli écrin.
LE PAPILLON DU COEUR
DE SOPHIE GUIBERTEAU & LEE JIN-KYOUNG
Éditions Chan-ok, 30 pages, 14.25 €