Depuis leurs débuts le 13 juin 2013, BTS sont indéniablement devenus l’un des plus grands noms de l’industrie musicale. Non seulement ils ont dû faire face à de nombreuses difficultés pour atteindre leur position actuelle, mais ils ont aussi ouvert de nombreuses portes à l’industrie de la K-pop sur le marché occidental. C’est ce double sens qui se reflète derrière le titre Sur la route de BTS : il désigne à la fois le chemin parcouru depuis leurs débuts, mais aussi la manière dont « ils sont les pionniers d’une voie que personne n’a encore empruntée. » (p.11).
Alors que les biographies non officielles foisonnent sur les étalages des grandes surfaces, Hong Seok-kyeong offre l’analyse jusqu’ici la plus poussée concernant BTS, complétant le travail de Lee Jeeheng et l’excellent BTS au cœur des ARMY, ouvrage sociologique centré sur les fans du groupe. Découpé en six chapitres, Sur la route de BTS recontextualise le succès du groupe au sein du système culturel et économique qu’est la K-pop, l’utilisation du transmédia dans leur stratégie marketing, leur impact auprès de la jeune génération, l’organisation de leur fandom, leur rôle dans la représentation asiatique et leur redéfinition de la masculinité.
Ainsi, Hong Seok-kyeong revient dans un premier temps sur la naissance même du système de training et les éléments qui ont su contribuer à une meilleure accessibilité des contenus culturels étrangers dans le monde, tout en soulignant ce qui a distingué BTS des autres groupes dès leurs débuts.
Elle consacre notamment un chapitre entier à la stratégie marketing de Big Hit et l’analyse du transmédia de BTS, un concept fascinant : l’élaboration d’une narrative fictionnelle qui s’étend sur divers canaux tels que les réseaux sociaux, la musique, la télévision, la littérature, les jeux vidéo… Cette narrative débute avec la série The Most Beautiful Moment in Life (2015), série centrée sur la beauté et les déboires de la jeunesse, en donnant à leurs clips vidéos des personnages, une trame, des rebondissements. Un concept bien peu exploité à l’époque, selon l’autrice : « Toutes les qualités qui distinguent BTS des autres groupes de K-pop, et même de tous les autres groupes existants, ont été créées avec cette narration. » (p.89).
Impossible de parler de BTS sans mentionner les ARMYs. Comme Lee Jeeheng avant elle, et en rassemblant des témoignages de fans, Hong Seok-kyeong s’intéresse aux ARMYs aussi bien en tant qu’individus que communauté organisée (traducteurs, promoteurs, éducateurs, etc.). En outre, l’analyse de plusieurs chansons ouvre une parenthèse révélatrice des mœurs et difficultés de la société contemporaine (études, pauvreté, relations familiales, génération N-po, etc.).
L’autrice conclut avec un regard sur le rôle du groupe dans la représentation asiatique et la perception de la masculinité en Occident. Une occasion d’aborder plusieurs phénomènes sociaux liés à la race et la sexualité dans le domaine de la K-pop : le whitewashing, l’appropriation culturelle, la non-représentation, la masculinité toxique, le fanservice, l’hétéronormativité…
« Il fut un temps où j’étais envieuse quand on disait que l’anglais et le français étaient les langues de Shakespeare et de Molière. Mais aujourd’hui, le coréen est devenu la langue de BTS. » (p.193)
Ouvrage académique sans être inaccessible, Sur la route de BTS trouve l’équilibre nécessaire pour s’adresser aussi bien aux fans qu’aux curieux en dressant des parallèles avec la pop culture occidentale. De plus, Hong Seok-kyeong use de son expérience d’enseignante à l’Université de Bordeaux pour dresser des comparatifs avec la jeune génération française, un petit plus pour nous.
Sur la route de BTS
Hong Seok-kyeong
Traduit du coréen par LEE Tae-yeon et Jean-Claude de CRESCENZO
Decrescenzo éditeurs, 2024
275 pages, 23,90€
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