Événements
Le 16 avril 2014 à 15 miles au sud-ouest de l’île de Jindo, Corée du Sud, le ferry Sewol sombre. Son chargement est de 3 à 5 fois au-dessus de sa norme. Le propriétaire de la compagnie du ferry Sewol, Cheonghaejin Marine Co, était Mr Yoo Byung-eun. Yoo Byung-eun est relativement connu en France, sous le nom de Ahae, en tant qu’artiste photographe, et mécène donateur pour le Louvre et le château de Versailles¹. Yoo Byung-eun est un ancien pasteur évangélique, écrivain religieux, inventeur, co-fondateur d’un mouvement religieux classé comme secte en Corée du Sud. Il a aussi été recherché pour détournements de fonds et évasion fiscale. Le 12 juin 2014 son corps est retrouvé en état de décomposition par la police sud-coréenne. L’annonce officielle de sa mort a lieu le 22 juillet.
Extrait de S.E.W.O.L « Entrelacs d’eaux »
Je traverse l’aéroport. Une propreté effrayante, un avant-goût de mort sous les odeurs des détergents améliorés. Un jus invisible. Avec l’âge je suis sensible à ces relents, mon indicateur de fantômes est saturé. Fragrances ; parfums humains de dominants sur zones de commerce chic, obsolescence, compétitivité en tendances.
Une odeur qui réclame ses serviteurs. Les voici, elle ou il, penchés à genoux, leurs visages cachés. Emmitouflés dans des tissus imprimés, ce sont surtout des corps. Deux corps lissent fortement la rampe noire caoutchoutée du tapis horizontal, tapis roulant à décupler la marche, à décupler l’efficacité des transits. La lenteur presque immobile de l’astiquage des rampes du tapis mécanique ; ridiculise toutes ces accélérations. Le caoutchouc de synthèse est dur nickel, mais je ne vois pas les visages, les sexes, les humeurs. Les corps abaissés doivent se noyer dans le global airport, style cinglant d’ignorer les pauvres. La hauteur de classe consiste à se donner les conditions d’éviter les autres. Pour ceux courbés vers le sol, salaires et durées de vie “on imagine”.
Lost & found, Baggage carousel, Immigration officer, Travel center… Incheon Airport, South Korea.
Je sors.
La première bouffée saisit, un air chargé ; exhalaisons d’essences kérosène, nature humide emplie d’insectes. Du vivant.
*
Taxi. Incheon. Express Way 130. Vers Séoul.
“ Lève ton regard de l’écran et le monde te sourira… Enlève ton regard de l’écran et regarde ton enfant qui sourit… Le monde te sourira… Oui, oui, oh oui lève ton regard de l’écran, lève ton regard le monde sourira…”. Fond sonore crème et mélange de K-Pop.
Spot radio d’État contre l’addiction portables tablettes. Une ritournelle puérile sans effets sur les solitudes égoïstes. Le chauffeur s’en fout, il attend la musique. Samsung, LG et les autres s’en foutent. Le miracle économique foudroyant s’en fout. Je suis filmé en permanence, le banal d’ici. Je ne sais pas encore repérer les caméras factices CCTV à 2000 wons, celles des taxis illégaux. Nous roulons au-dessus des limites de vitesse. Le GPS bipe toutes les 4 secondes dans un paysage à 120. Le chauffeur enlève un de ses gants usagé presque blanc, rétablit son oreillette ; main droite nue il grignote ses onion rings, flavoured.
Vert, immeubles, voies rapides, vert, immeubles, de la terre sans trop de vert auprès des immeubles, ciment, ponts, puis immeubles, immeubles, immeubles en ligne, peinture verte, peinture bleue, immeubles plus propres, immeubles plus petits, downtown mégapole.
Je suis à Séoul. J’y passe.
*
Vers là-bas. Île de Jindo côtes Nord, Ouest et Sud, Corée du Sud.
Temps splendide, mer calme chargée d’incompréhensible. Légère brise vers la digue, paysages de la mer Jaune. En horizon les îles montagnes ; les îles nuages, les îles dos de baleines, les îles encre d’estampes. Les passages historiques du général Yi Sun-Sin. Des eaux qui se malmènent quatre fois par jour, les poussées insaisissables du courant Uldolmok. Elles tourbillonnent. Yi Sun-Sin qui a désobéi au roi pour sauver ses hommes, le sans grade inventant de nouvelles stratégies maritimes, su élaborer de nouveaux navires aux formes marines. Il louvoie avec ces forces invisibles. Voiles ou rames selon les marées, la centaine de marins à l’abri sous la carapace blindée armée de piques recouvrant le pont supérieur est presque invincible. Une flottille de bateaux-animaux munis d’un rostre à éperonner fend ces eaux changeantes. Les flèches à feu, les mousquets, le feu continu des canons sont abrités par les sabords du pont inférieur. Des nuages morbides, mélanges de salpêtre et de soufre, peuvent tomber sur les ennemis comme des brumes. Les fumées asphyxiantes sortent de la gueule du dragon en figure de proue. Les bateaux Tortues possèdent l’aisance du poisson lorsque la lourde tortue nage, ou l’insensibilité du bouclier lorsque la carapace est au sol. Méditations profondes de la nature inspirante pour des stratégies offensives. 1592, le chant du sabre épouse intimement l’Uldolmok pour 6 années. « Si vous tenez à mourir, vous aller vivre ; si vous tenez à vivre, vous allez mourir. »
Vers la digue ou du haut des roches, le vent humide du détroit de Corée, les clapotis de surface des courants sont toujours les mêmes, semblables aux météorologies des batailles d’Okpo, de Sacheon, de Dangpo, de Danghanspo, de Busan, de Myeongnyang, de l’ultime combat à Noryang… Le repos du sabre de l’amiral aime l’île de Jin. Sur Jindo les larmes de silence peuvent couler, le soin réparateur du bœuf et du riz nouveau peuvent se digérer, et déféquer les combats gagnés contre l’insularité envahissante du Japon.
Des caisses de têtes coupées dans du sel, preuves des victoires, sont acheminées en nombre vers le palais royal de Séoul, endroit le plus béni de la terre. Pendant ces 6 années des centaines de corps-troncs flottants verdissent et gonflent dans les flots. Les générations de crabes, de mollusques, de coquillages discernent par instinct le chemin du goût salin des chairs amollies. Les cadavres décomposés se mêlent à la brise marine grâce aux tourbillons de l’Uldolmok .
Pointes grises aux pins et brumes de l’eau froide en surface. Pointes en désordre de verts clairs dans la chaleur mousson, l’eau toujours froide en profondeur. Sous toutes les allures des saisons ces mollusques
estiment maintenant les routes des sous-marins américains, chinois, russes ou autres. Ces coquillages de l’inquiétude demeurent insensibles aux noroîts changeants, aux bourrasques du Sud. Les rafales de neige du Nord-Ouest activent dans les fonds le couplage atemporel des anciens bateaux Tortues et de la modernité nucléaire. À la surface des transports de containers, des lignes régulières de ferry, les rafiots de pêches qui voguent au-delà de la ligne interdite des tankers.
La mer n’a rien à cacher, elle lave, elle sale, elle décrasse, elle blanchit puis dévore le métal.
Elle a depuis plusieurs mois commencé son œuvre de nettoyage.
Ce n’est pas le premier naufrage ici vers ses côtes dures à la navigation.
Crabes, coquillages, plancton apprennent à épeler S.E.W.O.L. avant que la peinture des lettres du nom de baptême s’efface sous la houle.
Influences des ondes, des corps, des passage des astres,
des particules en vibration dans des systèmes dépressionnaires, ondulent.
Sous l’eau au loin des marées de paradis,
la mer Jaune blanchit dans le vert noir.
*
Là. Île de Jindo côte Ouest, au calme.
Je suis en style motel, style love motel occasionnellement pour d’autres. C’est la campagne sur l’île. La pension du coucher de soleil, des rayons rouges peints confirment le panneau indicateur. Possibilités : se baigner l’été, pêcher depuis le rivage, faire griller, manger frais. Hiver fermé. Près des deux voitures garées sous des lampes bariolées et le regard du chien, j’attends le patron. Chambre au choix, il n’y a presque personne. Chambre Souci ou Chambre Balsamine en fond de coursive à l’étage supérieur. Le début de nuit est bruyant d’insectes. Sticker Balsamine, fleur de terres humides. Sticker Souci, la fleur suit le soleil. Des portes résistantes aux intempéries et des chambres identiques au lino poisseux s’alignent. Balcons terrasses vers l’eau salée, et vue sur les champs de cultures maritimes d’algues avant les îles grises. J’opte pour Souci. Souci et ses moustiquaires fatiguées, ses lampes disco-cheap dans l’alcôve du lit ; la télé voisine s’entend, les rôts aussi. Mes seuls voisins sont des plongeurs professionnels aux horaires de travail militaire, les mêmes depuis des jours répétitifs. Selon les conditions météo mes voisins photographient méthodiquement chaque cabine dans la carcasse du SEWOL maintenant couché sur le fond depuis 5 mois. Silences des plongées courtes en eaux froides. Selon le soju, selon la journée, selon les rêves, selon les nouilles instantanées, ils tentent de dormir. Les esprits de deux collègues sont restés en eaux froides. Les photographies sous-marines resteront confidentielles. Les images du ferry, écrans, portables, simulations, télévision regardées par les proches furent mouillées d’eau salée de rage, d’incompréhension. Les photographies sous-marines seront auscultées par des regards secs, indices pour une commission d’enquête sans pouvoirs. Les preuves d’un vide flottant.
*
Avant vers ici. Château de Versailles, Orangerie, France.
“Through my Window” version “Extraordinary within the ordinary”.
Un nuage isolé sur fond bleu, fenêtre sur l’extraordinaire.
Passe-partout ivoire, cadres comme il faut.
S’approcher.
Regarder de loin-(aah).
Lire les cartels-(mmh).
Gestuelle lente des regardeurs.
Versions plus contemporaines.
Contrecollé à tranches minces.
Baguette sombre. Format plus petit.
Regarder de biais.
Dédaigner le cartel.
Ne pas parler trop fort. Hocher de la tête, se montrer concentré, faire voir son regard. Tirages sur alu-dibond, photo-mural s’accouplant aux vieilles pierres.
Regarder à nouveau. Un
univers de gris et de crèmes ocres.
Sol jonc naturel.
Déco de l’art convention.
Là, la nature est convoquée ; biches, oiseaux, feuilles, arbres sous la neige, coucher de soleil, lac dans la brume, papillons, reflets d’arbres dans l’eau, un brun du soir, un vert du midi, un bleu du matin, des herbes, des branches, et encore des herbes…
Une pastorale de clichés niais se reproduit sous zoom, à n’en plus finir. “Série Bambi”.
Une série proche des tests photographiques comparatifs dans les publicités.
Ahae, Vanderbitt Hall, New-York City. Ahae, The Great Hall at the National Gallery, Prague. Ahae, Clarence House Gardens, London. Ahae , Royal Botanic Gardens, London. Ahae, Vremena Goda Center, Moscow. Ahae, Vanderbit Hall, New-York. Ahae, Alinari National Museum, Florence. Ahae, Maggazini del Sale, Venice. Ahae, Jardin des Tuileries, Paris. Ahae , Château de Versailles, Orangerie, France.
Orangerie de pierres patrimoine, ambiance Vivaldi, météoexpo à la place des arbres à fruits orange, l’accrochage sonne comme un alibi.
Catalogue, gros catalogue couché épais et papier archival. Attention aux miettes de macarons pistache. Ahae donateur, mais pas de chiffres. Attention aux traces chocolat.
« Oh vous savez, non non non… C’est la règle nous ne donnons pas de chiffres. »
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Avant Jindo. Aire d’autoroute, Honam Expressway, Corée du Sud.
Au-dessus de chaque urinoir de faïence blanche, une petite photographie de nature contraste avec les odeurs présentes. Banalité, rapidité des passages, pause miction.
Tout en pissant, je prends d’une main le numérique, déclics d’images de clichés, de la nature convenue par séries pour une aire d’autoroute, un Expressway. Les pissoirs me redonnent en mémoire les photographies de l’Orangerie et de ses biches, reflets, oiseaux, feuilles…
Il est donc possible de photographier comme on pisse dans un flux motorisé
d’ordinaire, de prétendu extra ordinaire.
Numéro de comique je vous la refais nature-culture, je vous la refais, et je vous la refais, la même pas pareille. Il est donc possible de faire circuler une telle série de clichés au travers des capitales. New-York et Paris à deux reprises…
Essence. Je redémarre. J’oublie mais l’image persiste. Sens de la photographie.
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Exposition “ Fenêtre sur l’extraordinaire ” . Château de Versailles, Orangerie, France.
Socle marbre
Statue équestre
Royauté
Pouvoir absolu, c’est la règle.
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Yeux, tête, pensées.
Choisir la position de l’artiste pour conforter et agrandir son réseau d’influences, c’est articuler dans un même mouvement deux typologies artistiques récurrentes : celle du merchandiseur et celle de l’ambassadeur.
Merchandiseur imitateur. Qui aurait la bêtise de croire : que les photographies d’Ahae sont du même auteur, toutes issues d’un seul endroit, d’une seule fenêtre, d’un seul cadre, d’une même vision ? Il est plus juste d’imaginer un travail collectif de photographes-assistants régit par des objectifs définis : l’usage du numérique, le travail de retouche par ordinateurs lissants, la mise en ordre d’une même stylistique, le tout emballé par des techniques sophistiquées d’impressions. Stratégies initiées via les communications mercantiles. Dans les messages sur les cosmétiques, les crèmes, les antirides, les mêmes couleurs de gammes sont constantes d’un modèle à l’autre, d’une atmosphère à une autre, d’une campagne à une autre campagne vers la prochaine saison. Image de marque injonctive revendiquant un savonnage parfait des boutons de la nature. Mythologie artistique travaillée version storytelling. C’est beau. Exposition future, tête de gondole, grandiose distribution. Une greffe style global. Vision consensuelle de la nature pouvant être reçue par toutes les cultures urbaines macérées dans une bambisation du regard. La consécration de l’infantile, le kawaï-mignon.
Ambassadeur. Ambassadeur d’un jardin d’Eden image, Ahae induit des scénarios filtrants vis à vis du réel. Il sauce une esthétique du documentaire animalier avec une purée de pommade animalière. Il augmente le coefficient de fiction, en guidant la durée, le parcours, l’espace de l’exposition. Une architecture interne de bon goût administre des murs supports ; murs blancs ou gris perle se détachent de l’enveloppe existante pour conforter les photographies. Le regardeur flotte flotte flotte. Il navigue, glisse et régresse dans un goûtdart, il trempe, effet immersion. Ahae ambassadeur de lui-même nie les forces, les courants telluriques. La nature devient un parc, résurgence du “Hameau” de la Reine. Versailles. Château. Oubli. Déni et transformation du réel. Fabrique ambassadrice de pouvoirs, l’entreprise Ahae usine l’eucharistie des clichés. Une chirurgie esthétique chiffrée sur la banque Nature. Objectif la grande blanchisseuse Art.
Château, 5 millions d’euros prévus. 2,48 millions d’euros versés.
Bateau, 476 passagers enregistrés. 304 morts comptés.
« Oh vous savez, non non non… C’est la règle nous ne donnons pas de chiffres. »
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Aire d’autoroute, Honam Expressway, Corée du Sud.
Des hommes se soulagent, regards absents flottants vers des photographies.
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Là. Île de Jindo. Port de Paegmok.
Je contourne le petit port par la route côtière. Les fermes-maisons à ras de sol indiquent une gestion précise de la misère. Un état de survivance, cultiver, se nourrir, enfanter, mourir avec une peau desséchée. Rizières d’un vert imparable, parfois un motoculteur, des étendues de piments sèchent et se racornissent sur le bitume. L’habitude des journées pâles, l’habitude de l’air humide, l’habitude des nuits chien isolé. Les déchets brûlent lentement, sous le mont à l’abri des vents dominants.
Bientôt la fin, la disparition de cet endroit, de ces aires désinvoltes, de cette vie. Le projet d’une méga-marina et d’un port de paquebots sont en perspective. Un nouveau poste de pilotage est déjà achevé. Puis une digue neuve à Pegmok. Changement de nom, Pegmok devient Jindo Harbour.
La jetée est inaugurée, la ligne parfaite de ciment frais fait tâche dans l’usure des rares bâtiments et des algécos érodés. L’inox de la balustrade est étincelant, les soudures sans aucune rouille. Le petit phare rouge en bout est rouge printanier. Le journaliste local photographie. Bannière et officiels souriants. Les agriculteurs et les marins écoutent les discours assis sur des chaises plastiques. Les besogneux face à une affiche chromo du projet. Les officiels dans un même costume ville, leurs gants blancs tiennent collectivement la bannière. Tous ensemble vers le tournant touristique, la déviation économique. La jetée naissante ne sait pas encore son futur.
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Là. Naufrage.
La jetée est vierge dans la baie où se mêle l’eau salée et l’eau douce. Un matin le SEWOL coule lentement à 15 miles, le ferry comme une baleine échouée. Elle fut une digue, elle devient une information. Une actualité où les bourrasques s’engouffrent. La jetée devient un plateau télé ; un pont vers les morts. La jetée se retourne, elle envoie des flots. Digue prothèse de terre aimantée par les noyés. Les survivants sans amarres errent le long de Jindo Harbour. Une ligne de ciment trop large pour des sans-repos sans ossuaire.
Des rizières d’un vert imparable plus loin. La ligne de petits monts, des montagnes de roches, au bord du bleu.
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Maintenant. Digue Jindo Harbour.
Chapeau de paille larges bords, chapeau des campagnards.
Le veilleur du port surgit de sa tente.
“Uldolmok, Uldolmok !”
Des cris, des gestes agités. Oui. “Ici Ici Ici région des tourbillons”.
“C’est les forces magnétiques ! C’est les forces qui ont aimantés le SEWOL Uldolmok ! Chungmu ! Yi Sun-sin !”.
Le veilleur habite une tente au milieu de la digue. Juste après les tentes des moines, et celle des chrétiens.
Sur la bâche de sa tente en caractères feutres indélébiles. “ Protéger dignité des enfants / Je veux ”. Posé à flanc sur la rampe métal de la digue, une planche en polystyrène. Le contour, la carte simplifiée des deux Corées. “ Comme Yi Sun-sin amiral / Je veux ! Comme Chungmu / Je veux ! ”. Le tout ressemble à un os simplifié. Un os blanchi. Une tranche flottante de polystyrène pour s’agripper. Un balai en plastique est posé à côté. Tout est propre.
Il fait face, parle fort : “Pour vous, il y a Renaissance, voici temps Coréssance ! Nord et Sud ! Comme Chungmu amiral victoires / Il y aura / Il y aura victoires avec tourbillons ! Uldolmok, Uldolmok !” Plus avant dans une autre tente, le moine récite depuis plusieurs mois, comme tous les matins, petits frappements de tambourin à la main, litanies. Soleil, brumes, pluies, peu importe encore la les prières. Des rubans jaunes avec des noms d’enfants, les fils jaunes des vœux s’effilochent.
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Ailleurs, en même temps. Place Ganghwamun. Statue amiral Yi Sun-sin, (Chungmu). Séoul.
Ils sont tous sous le même modèle de tente bien aligné, familles endeuillées. Grève de la faim. Un dessin de ferry avec des ballons d’enfants sur les T-Shirts. Un navire trop lourd soulevé, un ferry en lévitation grâce à quelques ballons, deux rouges, deux jaunes, deux verts, deux roses, et une coque bleue.
“We want the truth”. Un dessin enfantin. “Through my window”.
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Place Ganghwamun. Statue amiral Yi Sun-sin. Séoul.
Casque de guerre, trois pointes, un trident Poséidon dressé vers le Ciel.
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Peut-être. Quelques miles nautiques à l’ouest de l’île de Jindo.
L’hélice d’un sous-marin nucléaire ne laisse aucun écho sur le sonar.
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1. C’est le journaliste Bernard Hasquenoph, qui le premier mit en évidence les liens entre les identités d’ Ahae et Yoo Byung-en. Voir Ahae Mécène Gangster, Ed. Max Milo. 2015.
Texte reproduit avec l’aimable autorisation de l’auteur et de la revue Hippocampe. Un livre est en projet pour prolonger le travail entamé dans la revue. Il sera publié en 2017 par les éditions Hippocampe.
Crédits images : © Bruno Carbonnet.