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The Abandoned Empress

Enquêtes
Enquêtes réalisées sur 1000 hommes et femmes de plus de dix-huit ans. Elle a eu lieu en ligne du 26 au 29 novembre 2021 et possède un taux de confiance de 95%.
Changement de nom
Dans la Bible, nombreux sont les hommes qui se sont vu attribuer un nouveau nom par Dieu.
Harem
Ici, groupe d’homme qui entoure une femme. Généralement, c’est l’inverse que l’on retrouve dans l'histoire ou même dans les mangas (bandes dessinées japonaises).
White Day
En Corée le White Day a lieu le 14 mars. Durant cette journée, les garçons offrent des chocolats à la fille qu’ils aiment (définition du Tome 2 de The Abandoned Empress). C'est une fête d'origine Japonaise (1978).
Source
Selon : Kosinnews (고신뉴스), article de Lee Guk-hee, 2021 Yeoron sokui (여론 속의), article de Lee Dong-han, 2021
Couverture Tome 1 – The Abandoned Empress. Édition Kbooks © iNA, Yuna 2017 / D&C WEBTOON Biz

Depuis des siècles, la péninsule coréenne voit passer sur son sol diverses religions et mouvements de pensées ; chamanisme, bouddhisme, taoïsme, christianisme, confucianisme. Quelques fois, la croyance persiste jusqu’à en devenir la religion officielle du pays, tel le bouddhisme sous Koguryo (372) avec le roi So Su Lim, ou encore le confucianisme devenu au fil du temps l’idéologie première dans la pensée coréenne. Cependant, même si toutes furent importantes à une période donnée pour le pays, ces dernières années c’est le protestantisme qui s’impose majoritairement. En effet, selon vingt-trois enquêtes réalisées en 2021 par Korea Research intitulées « Indicateurs religieux 2021 : état actuel de la population religieuse », le nombre de croyants par grandes religions reste inchangé depuis 2018. Les proportions de croyances religieuses sont réparties ainsi :

  • 20 % Protestants
  • 17 % Bouddhistes
  • 11 % Catholique
  • 50 % Sans religion

Le protestantisme devenu aujourd’hui la première religion de Corée du Sud, peut expliquer partiellement la popularité du webcomic The Abandoned Empress. Deuxième série de la plate-forme Verytoon, ce livre romantique nous plonge dans un univers où Dieu dirige tous les destins, pour le bonheur des uns et le malheur des autres.

Tome 1 – The Abandoned Empress

Extrait page 18 – The Abandoned Empress. © iNA, Yuna 2017 / D&C WEBTOON Biz

Après l’apparition d’un oracle prédisant la naissance de la compagne du futur empereur, Aristia nait et est alors vouée à devenir impératrice. Elle est obligée de se cultiver, d’apprendre les bonnes manières royales, de ne fréquenter personne et de ne pas laisser transparaître ses émotions. En d’autres termes, d’être au moment du couronnement l’épouse et l’impératrice parfaite. Privée de liberté, elle ne pense qu’au moment où elle épousera l’homme à qui elle est destinée. Seulement, sa vie s’effondre lorsque apparait de nulle part, au lac du palais impérial, une jeune femme non répertoriée. Peu de temps après son arrivée, une nouvelle interprétation de l’oracle est donnée : cette inconnue est la véritable impératrice. Aristia est aussitôt reléguée au second rang, en tant qu’impératrice secondaire, seconde femme de l’empereur. Durant toute sa vie, la jeune femme fut privée de joie, d’amitié, d’amour, pour que finalement son destin soit mal-interprété. Elle en veut au monde entier mais essentiellement à Dieu. Pourquoi a-t-il permis cela ? Elle qui pourtant n’a fait de mal à personne. Au contraire, elle a toujours essayé de faire les choses bien. Peut-être même un peu trop puisque cela l’a menée à sa perte… Toutefois, le destin, ou plutôt ce Dieu qu’elle déteste tant dorénavant, lui donne une seconde chance. Il lui redonne la possibilité de recommencer sa vie. Est-ce qu’elle connaitra le même destin ou est-ce qu’elle vivra plus heureuse ?

The Abandoned Empress (버림 받은 황비- mai 2017) est l’un des webcomics les plus impressionnants, émouvants, déroutants et intrigants que les éditions KBOOKS ont publié jusqu’à maintenant. Il traite de nombreux sujets de société, certains plus ou moins sensibles ou d’autres plus ou moins anciens, tels que la religion et la situation des femmes de l’époque. En lisant le tome 1, les lecteurs pourront pleurer et rire, avoir pitié et être fascinés, être touchés et en colère… Des sentiments partagés par le travail conjoint de la scénariste Ina et de la dessinatrice Yuna. Ina a commencé sa carrière dans une revue spécialisée dans la romance, ce qui se ressent dans le livre, et elle est aussi autrice de Les archives du monastère Roland publié en trois tomes sur Naver. 

Extrait page 27 – The Abandonned Empress. © iNA, Yuna 2017 / D&C WEBTOON Biz

Les femmes se reconnaitront davantage dans l’histoire, par le point de vue interne majoritairement féminin, mais aussi par les nombreuses actions et pensées réalisées par amour, jalousie ou encore par méfiance. Néanmoins, même si l’aspect adorable du livre pousse à croire que ce webcomic est seulement dirigé vers un public féminin, son scénario dramatique montre qu’un lecteur masculin pourrait tout autant se plaire à le lire.  

En effet, l’histoire est assez rude. Une vie détruite, un amour à sens unique, un Dieu abandonnant le personnage principal, et des premières images affichants une mise à mort à la guillotine. Si Dieu existe, pourquoi a-t-il permis une telle destinée ? C’est l’une des questions que tout le monde s’est posé au moins une fois dans sa vie. Etonnement, le webcomic donne une raison absurde à l’héroïne, « il a perdu la trace de la première impératrice » ; raison à laquelle la religion protestante ne peut adhérer puisque selon les croyants, Dieu est omniscient, omnipotent, et omniprésent – il voit tout et il sait tout. À aucun moment il n’aurait pu perdre une personne de « vue ». Effectivement, grâce à certains termes, tel que le mot « temple », ou l’appellatif « Dieu », et d’illustrations telle que l’apparition de Dieu par des paillettes sans jamais voir sa forme physique, et le changement de nom d’Aristia, les lecteurs peuvent s’apercevoir que The Abandoned Empress traite du protestantisme. Cependant, la religion telle qu’elle est représentée dans le livre risque de donner une image confuse de ce qu’elle est réellement. Des faits tels que le savoir incontesté de Dieu ou encore sa grâce et sa miséricorde envers sa création, sont ici remis en question dans une critique du protestantisme. Ici, Dieu est mis au centre du malheur d’Aristia.  

Extrait page 36 – The Abandoned Empress. © iNA, Yuna 2017 / D&C WEBTOON Biz

Outre ce thème, la représentation de l’amour est omniprésente même si elle est dirigée de manière différente pour chaque personnage. Bien que l’attachement à l’empereur soit l’élément principal du premier tome, la découverte de l’amour paternel et amical par Aristia occupe la majorité du tome deux. En effet, privée de son enfance, la jeune femme n’a pu connaitre ni l’affection de son père ni celui d’amis puisqu’elle n’en avait aucun et finira par ne plus croire en l’amour. Cet élément qui, à première vue, semble secondaire, devient en quelques chapitres l’une des intrigues principales de l’histoire, bien avant l’idée qu’elle trouve un mari. L’envie des lecteurs d’en savoir plus sur l’avancée de cette relation père-fille, et par conséquent sur le développement du bonheur d’Aristia, prévaut sur la romance du scénario.

C’est une histoire lointaine aux allures de contes de fées.

Tome 2 – The Abandoned Empress
Extrait page 50 – The Abandoned Empress. © iNA, Yuna 2017 / D&C WEBTOON Biz

Les lecteurs pourront rencontrer de nombreux personnages masculins. Sans réelle surprise, ils sont plus présents et plus hauts gradés que leurs consœurs féminines. À l’époque, et encore aujourd’hui dans le monde, les hommes occupent majoritairement les places importantes dans les entreprises ; par l’idéologie que les femmes ne doivent pas être au pouvoir, mais aussi, parce qu’après être tombées enceintes, les femmes asiatiques arrêtent généralement de travailler pour s’occuper de leur enfant. Dans The Abandoned Empress, on retrouve aussi cette critique de l’homme puissant à qui tout est dû, même si son bonheur se fait au détriment de celui des autres. Seulement, dans cette histoire, la forte présence masculine est aussi due à la création d’un harem pour le personnage d’Aristia. Le proverbe « un de perdu, dix de retrouvés » prend ici tout son sens.

Au sein du tome 2, l’explication d’une fête asiatique, le White Day, semble réaliste par rapport à l’histoire moyenâgeuse. Bien que ce livre soit une fiction, les lecteurs pourront découvrir certaines traditions, coutumes et éducations qui diffèrent et, ou, n’existent pas en Occident mais qui demeurent en Asie. 

Tome 2 – The Abandoned Empress

De la même manière que Hellbound, The Abandoned Empress possède des illustrations qui se déplient et une première de couverture originale. En effet, celle-ci est revêtue de traits argentés qui sont incrustés dans la page d’une manière discrète et qui rendent la couverture brillante ; un aspect qui ramène un côté féminin. Le style graphique des personnages est assez différent des autres licences de KBOOKS, ici les traits mangas sont relativement discernables. Les lecteurs s’apercevront que ce webcomic est la transposition d’un manga en couleurs dans une bande dessinée. Pour une fois, les illustrations remplissent toute la page, éliminant les numérotations à certains moments, ce qui permet aux lecteurs d’admirer plus facilement les dessins magnifiques de la dessinatrice Yuna. Comme énoncé précédemment, même si les images sont gaies, enfantines et que certaines parties de l’histoire semblent niaises, The Abandoned Empress est en réalité une histoire sombre où le seul but est la survie.

Voici donc le récit d’une jeune impératrice qui voit sa belle et heureuse destinée s’envoler. Une histoire riche en émotions qui incite à oublier le passé et vivre comme on l’entend.


The Abandoned Empress
Scénario de Ina, illustrations de Yuna
KBOOKS, 256 pages, 14,95€

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