« La combinaison entre pharmacie et musique n’était pas toujours harmonieuse. Mais à ce moment-là, il trouvait qu’elles se mariaient parfaitement. Les médicaments qui soignaient le corps et la musique qui soignait le cœur, ces deux choses avaient bien un point commun. Quand un monde déformé changeait sans cesse au fil des coups qu’il encaissait, devenait-il plus harmonieux ? » (p.221)
La « Pharmacie de l’amour », ou le croisement entre thérapie et chimie, un lieu bien étrange où s’aventurent les curieux et les intrigués à la recherche du bonheur – et un nom surprenant pour un établissement qui ne vend en réalité pas de médicament. Ici, vous ne trouverez que le « Viagra mental », la solution à tous vos soucis amoureux, disponible uniquement après consultation avec Hyosun, la musicothérapeute de cette petite entreprise familiale. Fruit des recherches en laboratoire du père, ce philtre d’amour, composé à partir d’hormones et activateur de divers sentiments, apporte une réponse aussi bien aux problèmes de cœur qu’à la dépression ou encore aux conflits familiaux.
Relevant du genre du feel good, nous pourrions nous attendre à ce que ce roman nous propose une lecture douce et légère, mais il n’en est rien. Les Potions d’amour de la famille Botero vous plonge au cœur d’un méli-mélo d’histoires, de drames et d’affrontements. Les rencontres abondent et la chronologie éclatée de la narration produit un effet de suspense intense. De prime abord, il paraît difficile d’y voir clair à travers le brouillard des souvenirs passés et des événements actuels de chacun : les personnages se faisant nombreux et les chapitres alternant entre les différents points de vue, il est facile de se perdre dans la narration dès qu’on se déconcentre un peu. Mais là est tout l’intérêt de ce roman : les processus interpersonnels. Si cette lecture acrobatique semble contraignante, on finit par comprendre qu’elle est essentielle pour l’avancement du livre.
« Quand on arrivait à produire des étincelles dans le corps d’un humain à l’aide de silex, elles pouvaient par la suite se transformer en grandes flammes. Certaines relations humaines éteignaient ces étincelles et d’autres avaient plutôt le rôle du silex. Le philtre d’amour était peut-être le catalyseur de ces étincelles. » (p.148)
Vous ferez dans ce livre la rencontre de Park Aechun, dirigeante d’une agence matrimoniale, et de son mari ; un couple étrangement dysfonctionnel quand on connait la profession de Mme Park. Leur fille n’étant pas épargnée, tous trois sont bien malgré eux amenés à s’orienter vers ce nouvel établissement, ouvert depuis peu mais déjà victime de commérages dans le quartier.
Si le titre du roman évoque le nom du peintre colombien Fernando Botero, c’est peut-être parce que les œuvres de ce dernier ont inspiré l’apparence du biochimiste et père de Hyosun, qui est décrit comme assez fort et peu gracieux. A contrario, Madame Han fait possède une grande beauté, source de jalousie et d’admiration pour beaucoup, mais qui ne fait qu’accentuer l’ambiance hostile au sein de son propre foyer. Eh oui, les prêcheurs de l’amour eux-mêmes ne semblent pas toujours en mesure d’adopter leur propre philosophie et science quand l’orage gronde au sein de leur couple.
Parmi les personnages, la rencontre avec Jinhyeok et sa partenaire symbolise l’ancrage encore profond des mœurs traditionnelles coréennes dans la société actuelle. Malheureusement, de nos jours, il n’est pas rare que les Coréens subissent encore une grande pression au mariage de la part de leur famille. Se marier pour bénéficier d’une réputation, d’une situation financière ou simplement pour ne pas dépasser du cadre, au détriment de l’expérience d’un véritable amour, telle est la réalité vécue par de nombreux Coréens. Un message important de ce roman qui mérite d’être véhiculé auprès du plus grand public.
« Après trois ans de mariage, Jinhyeok et la femme seraient alors l’exemple parfait d’une famille de classe moyenne aux yeux d’autrui, même si ce n’étaient que des faux-semblants. Jinhyeok voulait simplement être le héros du plan parfait établi par ses parents. » (p.110)
Cela étant, il est assez dommage de retrouver à plusieurs reprises des coquilles de traduction et fautes d’orthographes détonnant à la lecture ; la fluidité du livre ne s’en trouve que plus obstruée. Cependant, la couverture du roman tout à fait représentative de son genre fera probablement envie à tout fan de feel good. Mais afin de dissiper toute confusion, bien que le thème de l’amour soit omniprésent – et ce, sous toutes ses formes – il ne s’agit pas là d’une romance, mais bien d’une histoire, ou de plusieurs histoires, de personnages égarés, écrasés de tracas, et pourtant toujours en quête d’amour et de relations. Ici, le lien prime. Il vous sera enseigné que l’affection, le pardon et la compréhension d’autrui sont les instruments de la réussite de toute relation, aussi endiguée soit-elle.
Aux amateurs de psychologie, ce livre est fait pour vous. Entre sociologie et psychanalyse, la richesse de ce roman et de la psyché de ses personnages ne cessera de vous émerveiller. À vous d’en déchiffrer tous les mécanismes !
Finalement, première traduction de Lee Sun-young en France, Les Potions d’amour de la famille Botero signe une belle entrée de jeu dans le monde du livre francophone pour cette autrice. Un roman réfléchi, profond, révélateur des travers d’une société encore soumise par des normes archaïques et restrictives. Une belle exploration de l’amour et de ses mille définitions.
Les Potions d’amour de la famille Botero
Lee Sun-young
Traduit du coréen par Johanna Clausse
Éd. Hauteville, collection Kibun, 2025
256 pages, 16,95€
La « Pharmacie de l’amour », ou le croisement entre thérapie et chimie, un lieu bien étrange où s’aventurent les curieux et les intrigués à la recherche du bonheur – et un nom surprenant pour un établissement qui ne vend en réalité pas de médicament. Ici, vous ne trouverez que le « Viagra mental », la solution à tous vos soucis amoureux, disponible uniquement après consultation avec Hyosun, la musicothérapeute de cette petite entreprise familiale. Fruit des recherches en laboratoire du père, ce philtre d’amour, composé à partir d’hormones et activateur de divers sentiments, apporte une réponse aussi bien aux problèmes de cœur qu’à la dépression ou encore aux conflits familiaux.
Relevant du genre du feel good, nous pourrions nous attendre à ce que ce roman nous propose une lecture douce et légère, mais il n’en est rien. Les Potions d’amour de la famille Botero vous plonge au cœur d’un méli-mélo d’histoires, de drames et d’affrontements. Les rencontres abondent et la chronologie éclatée de la narration produit un effet de suspense intense. De prime abord, il paraît difficile d’y voir clair à travers le brouillard des souvenirs passés et des événements actuels de chacun : les personnages se faisant nombreux et les chapitres alternant entre les différents points de vue, il est facile de se perdre dans la narration dès qu’on se déconcentre un peu. Mais là est tout l’intérêt de ce roman : les processus interpersonnels. Si cette lecture acrobatique semble contraignante, on finit par comprendre qu’elle est essentielle pour l’avancement du livre.
Vous ferez dans ce livre la rencontre de Park Aechun, dirigeante d’une agence matrimoniale, et de son mari ; un couple étrangement dysfonctionnel quand on connait la profession de Mme Park. Leur fille n’étant pas épargnée, tous trois sont bien malgré eux amenés à s’orienter vers ce nouvel établissement, ouvert depuis peu mais déjà victime de commérages dans le quartier.
Si le titre du roman évoque le nom du peintre colombien Fernando Botero, c’est peut-être parce que les œuvres de ce dernier ont inspiré l’apparence du biochimiste et père de Hyosun, qui est décrit comme assez fort et peu gracieux. A contrario, Madame Han fait possède une grande beauté, source de jalousie et d’admiration pour beaucoup, mais qui ne fait qu’accentuer l’ambiance hostile au sein de son propre foyer. Eh oui, les prêcheurs de l’amour eux-mêmes ne semblent pas toujours en mesure d’adopter leur propre philosophie et science quand l’orage gronde au sein de leur couple.
Parmi les personnages, la rencontre avec Jinhyeok et sa partenaire symbolise l’ancrage encore profond des mœurs traditionnelles coréennes dans la société actuelle. Malheureusement, de nos jours, il n’est pas rare que les Coréens subissent encore une grande pression au mariage de la part de leur famille. Se marier pour bénéficier d’une réputation, d’une situation financière ou simplement pour ne pas dépasser du cadre, au détriment de l’expérience d’un véritable amour, telle est la réalité vécue par de nombreux Coréens. Un message important de ce roman qui mérite d’être véhiculé auprès du plus grand public.
Cela étant, il est assez dommage de retrouver à plusieurs reprises des coquilles de traduction et fautes d’orthographes détonnant à la lecture ; la fluidité du livre ne s’en trouve que plus obstruée. Cependant, la couverture du roman tout à fait représentative de son genre fera probablement envie à tout fan de feel good. Mais afin de dissiper toute confusion, bien que le thème de l’amour soit omniprésent – et ce, sous toutes ses formes – il ne s’agit pas là d’une romance, mais bien d’une histoire, ou de plusieurs histoires, de personnages égarés, écrasés de tracas, et pourtant toujours en quête d’amour et de relations. Ici, le lien prime. Il vous sera enseigné que l’affection, le pardon et la compréhension d’autrui sont les instruments de la réussite de toute relation, aussi endiguée soit-elle.
Aux amateurs de psychologie, ce livre est fait pour vous. Entre sociologie et psychanalyse, la richesse de ce roman et de la psyché de ses personnages ne cessera de vous émerveiller. À vous d’en déchiffrer tous les mécanismes !
Finalement, première traduction de Lee Sun-young en France, Les Potions d’amour de la famille Botero signe une belle entrée de jeu dans le monde du livre francophone pour cette autrice. Un roman réfléchi, profond, révélateur des travers d’une société encore soumise par des normes archaïques et restrictives. Une belle exploration de l’amour et de ses mille définitions.
Les Potions d’amour de la famille Botero
Lee Sun-young
Traduit du coréen par Johanna Clausse
Éd. Hauteville, collection Kibun, 2025
256 pages, 16,95€