En découvrant cet imagier poétique et malicieux, on ne peut en effet manquer de faire le rapprochement avec Le petit prince de Saint-Exupéry : en réponse à la requête répétitive « Dessine-moi » qui introduit chaque nouvelle découverte, les autrices imaginent un petit garçon dans le rôle de l’aviateur, celui qui sait et qui bougonne un peu devant le défi lancé, mais qui s’y colle avec l’application et le sérieux qu’on attend d’un aviateur, pardon d’un dessinateur !
Un texte ritournelle, dont la formule répétée évoque à la fois l’embarras du porteur de crayon : « Hmm, c’est pas facile… » et la fougue de la découverte : c’est qu’il y a au moins quatre-cents races de chiens, cent mille coquillages, un million d’insectes !… Et l’on découvre de fait la diversité du monde, sa richesse et sa fantaisie à travers des séries colorées de coquillages, de fleurs et de fruits, d’insectes et de chiens de toutes races, et enfin de fillettes tout aussi différentes, joyeuses, qui courent et folâtrent en liberté, loin des cages grillagées où l’on enferme parfois aussi les roses, soi-disant pour les protéger.
C’est ainsi que, sans en avoir l’air, Malvia utilise ce stratagème accumulatif pour servir la cause des petites filles, loin des clichés normatifs et des stéréotypes dépassés.
Une grande douceur émane de l’illustration sage de Simji Park, nouvelle illustratrice coréenne que l’on découvre grâce aux éditions Le Diplodocus qui publient son tout premier album ! Mais cette apparente naïveté pour représenter l’enfance, porte en elle sa subversion : dans la précision de la finesse du dessin, dans l’effet d’accumulation des vignettes, et dans la richesse d’une palette toute en camaïeux de gris et bleu, de beige et de rosé, de rouges et roses fondus et pourtant pulpeux. Le dernier contreplat crée la surprise et la joie, pour une conclusion pleine d’espoir. Une magnifique découverte.
Dessine-moi
Milvia, Simji Park
Éditions Le diplodocus, juin 2023
40 pages, 13,50€