Depuis la nuit des temps, la Corée est influencée par les pays qui l’entourent. Forcée d’apprendre la culture chinoise et japonaise par suite de leur colonisation, elle n’a jamais vraiment eu le choix sur ses relations. Toutefois, depuis plusieurs décennies, la Corée du Sud est attirée par l’Occident, à tel point que les sud-coréens réalisent des opérations pour agrandir leur yeux pour leur ressembler. Tous les aspects de notre culture les attirent, en particulier notre littérature. Passant du Petit Prince à Harry Potter, les livres d’aventure les fascinent et les inspirent. L’un des exemples les plus flagrants est le webcomics récemment sortit chez les éditions KBOOKS : The Beginning After the End (“Le commencement avant la fin” – 2018). Guider par l’esprit de Geoffroy de Monmouth, le scénariste coréen connu sous le pseudonyme Turtleme s’est associé au dessinateur indonésien Fuyuki23 pour faire revivre la légende du roi Arthur, l’un des plus grands chefs-d’œuvre connus à ce jour.
Grey, un roi puissant et solitaire meurt soudainement sans en connaître la raison. Pensant aller au ciel, qu’elle ne fut pas sa surprise lorsqu’il se réincarne en Arthur Leywin. Premier enfant d’une famille modeste, il comprend rapidement que le nouveau monde qui l’entoure est très différent du sien. Ici, la magie régit tout et est omniprésente. Bien que dans sa vie antérieure, Grey fut un homme respecté et un combattant féroce, dorénavant il n’est qu’un enfant à qui l’on doit tout apprendre. Toutefois, Grey garde ses souvenirs d’autrefois et s’en sert pour apprendre et développer ses capacités plus rapidement que les autres enfants. À seulement quatre ans, il doit réhabituer son corps aux entraînements de combat. Sur le chemin pour une autre ville où on pourra mieux le guider, des bandits attaquent son chariot. Ils veulent capturer les femmes et le petit garçon pour les revendre. Rey, le père d’Arthur, lui donne alors une mission : protéger sa mère coûte que coûte. Y arrivera-t-il ?
Le nom de la série, The Beginning After the End, donne déjà, avant même la lecture, des indices sur la situation du roi Grey. En effet, la mort du souverain n’est pas sa fin, au contraire, il annonce le début d’une aventure aux multiples embûches semblables à la légende du roi Arthur.
En plus de la référence littéraire, l’auteur a décidé de donner des noms occidentaux à ses personnages. Nous retrouvons donc les prénoms Arthur, Alice, Rey, Jasmine, Helen et bien d’autres. C’est un fait assez original, encore jamais réalisé dans des webcomics d’origine coréenne. Il y a même la présence d’un nom latin, Xyrus qui peut faire référence à l’origine des langues occidentales.
Les lecteurs les plus aguerris pourront distinguer une référence, sûrement issue de Fuyuki23, à l’une des religions les plus connues et pratiquée au monde : le bouddhisme. Effectivement, ce que nous appelons « réincarnation » est, dans les croyances indiennes, la notion de « renaissance ». C’est le concept clé, celui qui poussent les personnes à croire. C’est d’ailleurs de là que vient le mot “karma”. Cela pousse les lecteurs à se demander si Grey possède désormais un bon ou un mauvais karma.
« Cette histoire de noyau me rappelle étrangement le centre de Ki auquel j’étais habitué dans ma vie passée. »
Sans grand étonnement venant d’un isekai, nous retrouvons aussi un renvoi à la culture japonaise. Moins difficile à trouver, le Ki est associé au terme que l’on retrouve souvent dans l’univers du jeu vidéo.
Le choix du design est lui aussi d’inspiration japonaise. Donnant cette impression de fan service, les femmes sont dessinées à fortes poitrines, tailles fines, cuisses rebondies. Il y a même des scènes et des illustrations mettant en avant cette pratique, tel que des morceaux de peau apparents voir, des positions. De nos jours, on retrouve fréquemment ce mode d’emploi dans les mangas, bandes dessinées japonaises. Cela est fait pour attirer l’attention du lecteur et lui donner envie de lire.
Turtleme décrit une société qui est encore aujourd’hui à l’opposée de celle de la Corée du Sud. Dans le couple qu’il a créé, c’est étonnement la femme qui dirige, voir même qui reprend son mari. Encore plus surprenant, le protagoniste Arthur apprend aux adultes des techniques de combats ! Des actions impossibles en Corée du Sud et même en Asie puisque le patriarcat est encore assez présent.
L’auteur pousse même un cri venant du cœur lorsqu’il permet au couple de voir leur enfant grandir. Les Coréens travaillent minimum cinquante deux heures par semaine, en plus du temps de trajet pour aller à leur emploi. Ils ne sont par conséquent que quelques heures par semaine avec leur enfant, ce qui les attriste beaucoup puisqu’ils ne les voient pas grandir. Beaucoup d’entre eux dénoncent ce fait pour essayer de changer les choses et profiter de leur descendance…
Adaptée d’un roman en ligne, cette série a déjà séduit de nombreuses personnes. Ses graphiques japonisés, l’univers magique et l’inspiration forte de la légende du roi Arthur, ont conquis les lecteurs dans le monde entier.
The Beginning After the End est un webcomic centré sur la magie mais aussi l’amour familiale. Les lecteurs suivent l’évolution d’Arthur, grandissent et apprennent avec lui. Ils y découvrent une histoire légère en apparence qui révèle des problèmes sociétaux actuels tels que la solitude, l’absence des parents, le patriarcat, …
L’union de Turtleme et Fuyuki23 a permis le mélange de deux cultures que l’on peut retrouver tout au long de ces pages. Deux cultures qui en cherchent une troisième, l’occidentale. Saurez-vous la trouver ?
The Beginning After the End
Turtleme, illustré par Fuyuki23
Kbooks, 2023