Lulu, un petit lapin dodu aux grandes oreilles mobiles, découvre dans un placard un carnet oublié : il s’agit du carnet de recettes de sa grand-mère, qu’elle a sans doute précieusement notées pour qu’il en profite un jour. Justement, il reconnaît une recette d’excellents biscuits à la carotte. Le voilà lancé dans une entreprise sérieuse : planter, récolter et apprêter les carottes pour confectionner ses cookies. Mais attention, il faut que Lulu suive la recette à la lettre pour retrouver les bons petits gâteaux qui font renaître les souvenirs de sa chère grand-mère. Les amis avec lesquels il les partage, en redemandent jusqu’à ce que Lulu ait l’impression de se transformer en machine à fabriquer des cookies carottes !
Là encore, la transmission va être la solution : après avoir partagé ses biscuits, Lulu décide de partager aussi la recette !
Ah qu’ils sont mignons ces petits lapins ! Tout dodus, tout joufflus, et souriant d’aise ! Et c’est sans parler des chatons, des oursons, des ratons (-laveurs), et tous les autres gentils petits animaux qui peuplent le monde enchanté de Na Du-na ! L’aspect satiné du papier fait chatoyer les couleurs de cet univers. Nuancées par un crayonné estompé, elles sont vives et éclairantes, même si dans les tableaux très denses des scènes de groupe par exemple, la lisibilité du détail en pâtit un peu du fait du manque de contraste.
Animaux anthropomorphes bien entendu, le motif revient aussi dans les albums traduits du coréen en français, « petits » pour les goûts affirmés pour les gâteaux, le sucré, et « grands » par l’indépendance, les souvenirs, la réflexion, le pouvoir de décision… Et du fait de cette double attribution, l’éventualité de personnages humains disparaît, alors même qu’on se plaît à imaginer la réussite du même traitement visuel sur des héros enfantins, servis par une artiste qui maîtrise l’art d’illustrer les sensations, les émotions : l’expressivité de son trait est jubilatoire, particulièrement dans les mouvements d’oreilles, les plissements de museau, la plasticité des petits corps rondouillets, exactement comme des corps d’enfantelets !
Par ailleurs, le découpage varié se révèle très astucieux pour souligner la même dynamique dans les rebondissements de l’aventure. En effet, la composition illustrée alterne vignettes, bandeaux, pleines pages, double page qui mettent en valeur le récit et les étapes de l’histoire. Le texte se partage grâce à ce choix entre des passages narratifs et des instantanés qui, plus ou moins scandés, donnent à certains moments comme la plantation des carottes ou la confection des biscuits, un petit côté comptine très agréable à lire comme à dire. D’ailleurs Lulu est aussi musicien, il a toujours une chanson dans sa guitare, et Na Du-na nous invite à chantonner avec lui ! Na Du-na est donc une autrice-illustratrice pleine de promesses !
En attendant, ce joli livre est à savourer, et laisse sur la langue un bon goût de biscuit et dans l’oreille une petite mélodie sympathique. Un bien agréable moment de lecture pour les petits.
Les Biscuits à la carotte
NA Du-na
Éditions de L’Élan vert, 2024
40 pages, 16€