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L’auteure Seh-Lynn présente Deux Coréennes

Un livre sur une transfuge nord-coréenne, devenu un dialogue entre deux femmes que tout aurait dû séparer.

Communisme
La Corée du Nord n'est cependant pas un pays communiste.
Seh-Lynn, auteure des Deux Coréennes

Le 20 octobre dernier, les Études coréennes de l’Université Aix-Marseille et la revue Keulmadang recevaient l’auteure coréenne Seh-lynn pour son ouvrage Deux Coréennes.

Dans un amphi presque complet, les étudiants de Licence et Master écoutèrent pendant près de deux heures l’auteure Sud-coréenne raconter sa rencontre avec Park Ji-hyun, une Nord-coréenne, transfuge, vendue en Chine par sa propre famille, qui réussit à s’enfuir et à trouver une issue de secours en Angleterre.

Les premiers contacts entre les deux Coréennes sont tendus, chacune se méfiant de l’autre, toutes deux prisonnières de leurs représentations, victimes de leurs préjugés toujours associés aux stéréotypes les plus courants concernant leurs pays respectifs. La première rencontre, Seh-Lynn la déclarera à l’Ambassade de Corée du Sud à Londres, conformément à la réglementation sud-coréenne qu’elle connaît bien, puisqu’elle est elle-même fille de diplomate. Cette rencontre sera suivie de bien d’autres et dès qu’un brin de confiance s’installa, l’idée de faire un livre surgit.

Un livre sur Park Ji-hyun d’abord, la transfuge nord-coréenne (voir à ce propos notre critique). Ce projet où l’auteure devait d’abord écouter puis écrire, s’orienta peu à peu vers le dialogue et le livre rédigé à quatre mains, quand bien même l’écriture revenait à Seh-Lynn. Mais les préjugés ont la vie dure et la raison n’est pas toujours suffisante pour les faire tomber. Mais comment se rapprocher quand tout a éloigné deux femmes nées d’une culture autrefois commune, aujourd’hui devenues quasiment ennemies ? Il fallut avoir recours aux souvenirs, les chants appris à la petite école, les repas de fêtes, pour découvrir ce que les deux protagonistes avaient en commun, une culture, une langue, des traditions ; et lentement, chemin faisant, tandis que la nostalgie poignait, tandis que pays et familles manquaient cruellement aux deux Coréennes, la détestation réciproque s’évaporait ; une détestation fabriquée de toutes pièces, par culture, par histoire, par idéologies — au Nord, la haine du Sud et des Américains ; au Sud, la haine du communisme. Tandis que chacune ouvrait son cœur à l’autre, tandis que Park Ji-hyun apprenait à laisser monter ses émotions, autrefois réprimées, une voix, la voie du livre, s’installait. La catharsis était à l’œuvre. Une amitié naissait.

Les questions des étudiants furent nombreuses et certains d’entre eux visiblement émus peinent à retenir leurs larmes. Il faut dire que le court documentaire projeté, une interview de Park Ji-hyun, la description de son séjour en Chine où elle fut littéralement mise en esclavage par sa famille aurait tiré les larmes du plus impassible d’entre nous. La séance de dédicace, sur un bout de papier le plus souvent ou un carnet, s’apparentait alors à une longue procession d’étudiants heureux d’avoir eu une illustration de la déprise nécessaire quand on doit aller à la rencontre de l’autre.

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